Photo prise le 3 janvier 2017 montrant le domaine de Montfleury à Versoix, en Suisse (Xinhua/Xu Jinquan)
GENEVE, 15 janvier (Xinhua) -- A une dizaine de kilomètres de Genève, dans la petite ville de Versoix, se trouve une grande demeure blanche riche en histoire : le domaine de Montfleury. Cette villa cossue a été le témoin de la première apparition majeure de la Chine nouvelle sur la scène mondiale lors de la Conférence de Genève en 1954, après la fondation de la République populaire de Chine en 1949.
Le domaine est si grand que l'on perd facilement son chemin en cherchant le bâtiment. Un jour de bruine, les journalistes de l'agence Xinhua se sont rendus à la villa, où un vieil homme aux cheveux blancs les a accueilli. Habitant des lieux depuis de nombreuses années, il a eu l'occasion de rencontrer un grand nombre de visiteurs chinois.
Le bâtiment de trois étages est entouré par d'autres villas résidentielles. A l'entrée, une plaque en cuivre indique, en chinois et en français, que le Premier ministre chinois Zhou Enlai y a logé en 1954.
La Conférence de Genève s'est ouverte au Palais des Nations le 26 avril 1954. Les délégations de l'Union soviétique, des Etats-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de la Chine et de 40 autres pays et régions ont participé à cet événement. La Chine a envoyé une délégation composée de 180 membres, dirigée par Zhou Enlai.
La Conférence fut le théâtre de batailles diplomatiques féroces, de tractations intenses et d'intrigues tramées par certains pays occidentaux sous l'influence des Etats-Unis, qui étaient à cet époque très hostiles à la Chine. A tel point que les négociations ont été qualifiées par certains historiens de "champs de bataille sans fumée".
Pourtant, les qualités et l'expérience diplomatiques de Zhou Enlai ont non seulement permis à la Chine de gagner des alliés, mais aussi de convaincre ses rivaux au terme des négociations.
La Conférence s'est achevée sur l'adoption d'une déclaration finale sur l'Indochine qui a ouvert la voie à un cessez-le-feu entre la France et le Tonkin, ce qui a joué un rôle crucial dans l'accession à l'indépendance des peuples indochinois.
En outre, la Conférence a montré au monde que le peuple chinois avait déployé d'immenses efforts pour sauvegarder la sécurité de son pays et apporté de grandes contributions au maintien de la paix dans le monde en défendant la cause du progrès humain et en recherchant des solutions aux litiges internationaux par la voie des négociations.
Au cours de la Conférence, plusieurs personnalités étrangères ont visité le domaine de Montfleury, notamment le secrétaire britannique aux Affaires étrangères Anthony Eden et le célèbre comédien britannique Charlie Chaplin.
A cet époque, le gouvernement britannique hésitait sur la politique à adopter à l'égard de la Chine. Certains ministres souhaitaient l'amélioration des relations avec la Chine, tandis que d'autres soutenaient fermement les Etats-Unis dans leur confrontation avec le pays.
Les gestes sincères de la délégation chinoise ont tellement impressionné M. Eden qu'il s'est entretenu avec ses membres de nombreuses fois et est devenu l'un des invités les plus fréquents de la Villa.
Les deux parties ont également conclu un accord prévoyant l'envoi d'un chargé d'affaires chinois au Royaume-Uni, ce qui a grandement favorisé les relations bilatérales. Ces rencontres ont été évoquées par M. Eden dans ses mémoires.
Pour sa part, Charlie Chaplin, qui vivait en Suisse l'année de la Conférence, n'a jamais cessé de manifester son amitié pour la Chine, dont il a toujours apprécié la culture et l'art, malgré la situation internationale hostile. A la veille de la fin de la Conférence, Zhou Enlai a invité le couple Chaplin à dîner à la villa et leur a raconté la légende chinoise des amants papillons, ce qui fut une soirée formidable pour tous les participants.
Les interactions du Premier ministre chinois avec des célébrités dans la villa ont non seulement permis au monde extérieur de mieux connaître la Chine nouvelle, mais aussi de porter un coup à la propagande anti-chinoise menée par certains pays occidentaux.
Ma Zhaoxu, représentant permanent de la Chine auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que la Conférence de 1954 avait marqué l'entrée de la Chine nouvelle sur la scène internationale.
"En l'espace d'une soixantaine d'années, Genève a été le témoin du passage de la Chine d'un rôle de spectateur à celui de participant et de chef de file du système international", a-t-il indiqué.
Selon François Subiger, responsable de la radio et de la télévision à l'Office des Nations Unies à Genève, qui s'est rendu en Chine des dizaines de fois, de nombreuses choses s'oublient à mesure que le temps passe, "mais la villa évoque toujours les mémoires du passé, car elle a été témoin de la marche de la République populaire de Chine vers la scène internationale, après bien des vicissitudes".