Par Huang Han
Chengdu, 1er août (Xinhua) -- Le sommet du G20 qui se tiendra en septembre prochain dans la ville chinoise de Hangzhou différera des éditions passées : en effet, il sera présidé par le plus grand pays en développement au monde, la Chine. Cependant, une question demeure : la Chine réussira-t-elle à faire sortir les 20 principales économies mondiales de leur torpeur ?
La Chine souhaite vivement que sa présidence du G20, le plus grand événement diplomatique du pays de cette année, soit couronnée de succès. A moins de deux mois de ce sommet de deux jours, de nombreux dossiers sont déjà sur la table. Certains experts estiment que la Chine transformera le G20 en une plate-forme de gouvernance à long terme, au lieu d'un simple mécanisme de réaction aux crises.
GOUVERNANCE A LONG TERME
En tant que plate-forme importante de coopération économique internationale, le mécanisme du G20 vise principalement depuis des années à coordonner les politiques monétaires et budgétaires des plus importants pays développés et en développement au monde face aux crises financières mondiales. Cependant, après huit ans de reprise lente depuis la crise financière de 2008, les membres du G20 ressentent l'urgence de prendre des mesures collectives sur des aspects plus fondamentaux de l'économie mondiale.
L'un des objectifs du prochain sommet de Hangzhou sera d'élaborer un plan de croissance innovante qui comprendra un plan d'action concret pour mettre en marche une nouvelle révolution industrielle et construire l'économie numérique.
"Les politiques budgétaires et monétaires ne sont que des outils anticycliques qui permettent de réduire la volatilité à court terme", a indiqué Zhu Jiejin, professeur à l'Université Fudan de Shanghaï. "Ce sont comme des médicaments. Elles peuvent dissiper les symptômes de la maladie mais n'améliorent pas la santé de l'économie", a-t-il ajouté.
Le ministre suisse des Finances Ueli Maurer a souligné les efforts de la Chine visant à encourager l'innovation et d'autres réformes structurelles, qui selon lui sont importants pour accroître la productivité et garantir la qualité et la durabilité de la croissance.
"Sur cet aspect, le plan de croissance innovante du G20 représente un programme ambitieux qui cherche à établir un nouveau modèle de croissance fondé sur les connaissances et les technologies nouvelles et plus propres", a-t-il indiqué à Xinhua.
Un autre thème clé du prochain sommet du G20 sera la définition des étapes de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l'horizon 2030 (Programme 2030) de l'ONU. C'est la première fois que la priorité est accordée au développement dans un cadre macro-politique mondial.
"Les pays développés ne peuvent pas prospérer seuls dans un monde où les pays sont de plus en plus interconnectés", a indiqué Huang Wei, chercheuse de l'Académie chinoise des sciences sociales."Les pays développés et en développement doivent mettre en commun leurs ressources pour inverser la courbe de la croissance mondiale", a-t-elle estimé.
"Seule une approche holistique peut nous permettre de résoudre les problèmes fondamentaux de l'économie mondiale. Le G20 n'a toujours traité que de problèmes spécifiques", a-t-elle indiqué à Xinhua.
Par ailleurs, dans un contexte caractérisé par des échanges peu dynamiques et de faibles investissements, le G20 sous la présidence de la Chine a établi un nouveau mécanisme plus fonctionnel pour relancer l'économie : une réunion des ministres du Commerce visant à promouvoir le commerce international et l'investissement.
Cela pourrait être l'une des plus grandes percées du sommet de cette année. "De nombreux problèmes structurels à long terme de l'économie mondiale concernent le commerce et l'investissement", a indiqué Chen Fengying, chercheuse de l'Institut chinois de relations internationales contemporaines.
"Nous avons résolu des problèmes concrets, car la Chine a pris l'initiative de créer le groupe de travail sur le commerce et l'investissement et beaucoup contribué aux travaux du groupe, ce qui a été très productif", a déclaré Rita Teaotia, secrétaire indienne au Commerce.
ROLE DIRECTEUR DE LA CHINE
Le sommet du G20 de cette année sera également caractérisé par un plus grand rôle que jouera la Chine dans les affaires internationales.
"C'est la première fois que la Chine préside un sommet sur la gouvernance économique mondiale, ce qui n'est pas la même chose que de présider des réunions régionales telles que le forum de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC)", a souligné Mme Chen, qui a estimé que le sommet du G20 était une bonne opportunité pour la Chine de jouer son rôle dans les affaires économiques mondiales.
Comme le G20 est un forum international dénué de secrétariat ou d'institutions chargées de l'application des mesures convenues, ses résultats dépendent dans une large mesure de la volonté du pays hôte, a-t-elle expliqué.
"En tant que grand pays, la Chine a l'influence nécessaire pour faire avancer la réalisation d'objectifs spécifiques, en particulier quand ces objectifs coïncident avec les intérêts d'autres pays", a-t-elle poursuivi, saluant les plans d'action concrets proposés par la Chine, qui tranchent avec les vagues promesses du passé.
Selon les chiffres du Fonds monétaire international (FMI), 85% de la population mondiale vit dans les pays émergents et en développement, qui représentent près de 60% du produit intérieur brut (PIB) mondial et qui contribuent à plus de 80% de la croissance mondiale depuis la crise financière de 2008. La Chine a contribué à elle seule à 35% de la croissance mondiale ces cinq dernières années et le pays est à présent largement considéré comme un acteur de plus en plus important dans la gouvernance économique mondiale.
"Il y aura probablement des moyens pour créer de nouvelles institutions, étant donné l'émergence de l'Asie et de la Chine", a estimé Tim Harcourt, professeur d'économie à l'Université de Nouvelle-Galles du Sud (UNSW) en Australie. "Je pense que dans une certaine mesure, le G20 peut jouer ce rôle", a-t-il ajouté.
Dans un rapport publié en mars dernier, le think tank londonien Chatham House avait estimé que la Chine était aujourd'hui en mesure d'exercer son influence sur la gestion de l'économie mondiale et que d'autres pays étaient prêts à tirer des leçons des expériences de la Chine dans la transformation de son économie.