L'ambitieux accord de libre-échange africain vise à renforcer le développement (SYNTHESE)

French.xinhuanet.com|Publié le 2019-05-30 à 22:46
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KAMPALA, 30 mai (Xinhua) -- Sur le marché céréalier de Busia, du côté ougandais de la frontière entre l'Ouganda et le Kenya, les affaires sont florissantes : des camions transportant des marchandises en provenance de différentes parties de l'Ouganda sont déchargés, tandis que d'autres sont en train d'être chargés à destination du Kenya et du Soudan du Sud.

Ce pays d'Afrique de l'Est, selon son ministère des Finances, profite d'un excédent commercial avec la plupart des pays voisins. Ses exportations ont atteint 1,1 milliard de dollars en 2018, contre 425 millions de dollars en 2007.

Un tel essor du commerce transfrontalier se produit dans toute l'Afrique.

DE GRANDES PERSPECTIVES

Pendant des décennies, malgré une intégration commerciale accrue en Afrique, le commerce intra-africain était resté faible.

Selon un rapport publié l'année dernière par la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), les économies africaines sont fragmentées en raison d'obstacles au commerce, notamment de droits de douanes, de lourdes procédures frontalières et de goulots d'étranglement des infrastructures.

Le rapport de la CEA indique que ces obstacles limitent la capacité des entreprises africaines à réaliser des économies d'échelle et à développer des capacités de production compétitives pour le commerce régional et international de produits à valeur ajoutée.

Toutefois, étant donné que l'Accord de zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC) doit entrer en vigueur le 30 mai, le commerce régional entre les pays africains devrait augmenter.

La ZLEC, selon l'Union africaine (UA), aspire à créer un continent exempt de droits de douane, capable de développer les entreprises locales, de stimuler le commerce intra-africain et l'industrialisation, ainsi que de créer plus d'emplois.

Le pacte entre en vigueur après sa ratification par 22 membres de l'UA, ce qui correspond au seuil minimum requis pour l'entrée en vigueur de l'accord.

Si les 55 membres de l'UA rejoignent tous la zone de libre-échange, ce sera la plus grande zone de libre-échange du monde par le nombre de pays, couvrant plus de 1,2 milliard de personnes.

"La ZLEC entraînera une augmentation du commerce de produits et du transfert de connaissances entre pays africains, ce qui créera plus de valeur", a déclaré Yao Guimei, professeure d'études africaines à l'Académie chinoise des sciences sociales.

Cela facilitera également les procédures d'exportation afin d'amener davantage de pays africains à intégrer les chaînes de valeur mondiales et régionales, a poursuivi Mme Yao.

D'ENORMES OPPORTUNITES

Les chercheurs, économistes et responsables politiques sont convaincus qu'une mise en œuvre efficace de la ZLEC créera d'énormes opportunités pour le continent.

Abdelkhalek Touhami, économiste à l'Institut national de statistique et d'économie appliquée (INSEA) du Maroc, a déclaré à Xinhua que le pacte commercial renforcerait les échanges économiques entre Etats.

M. Touhami prévoit que le commerce intra-africain augmentera de 25% à court terme et de plus de 52% à long terme.

Il a ajouté que les investissements directs étrangers (IDE) vont également croître en raison des bénéfices des économies d'échelle et de la diversification existant dans différents pays.

Eric Mangunyi, chercheur à l'Université Walter Sisulu, en Afrique du Sud, a déclaré à Xinhua que la zone de libre-échange créerait un marché plus vaste pour les biens et services entre les pays membres, contrairement au format actuel où peu de pays font du commerce ensemble.

El Hadj Alioune Diouf, économiste à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, au Sénégal, a fait valoir que l'augmentation de la population africaine, actuellement estimée à 1,2 milliard de personnes, en est un élément clé.

Au fur et à mesure que les efforts visant à stimuler le commerce intra-africain prennent forme, des mesures sont en cours pour jeter les bases sur lesquelles le commerce pourra prospérer.

Les pays africains, avec l'appui des bailleurs de fonds internationaux, continuent d'investir dans la construction de corridors commerciaux et d'infrastructures, notamment de réseaux d'électricité interconnectés, de routes, de voies ferrées ainsi que de ports et d'aéroports modernes.

En Afrique de l'Est, la Chine finance la construction du chemin de fer à écartement standard qui reliera l'arrière-pays de la région au port kenyan de Mombasa. La ligne Mombasa-Nairobi au Kenya est déjà opérationnelle. Lorsqu'il sera pleinement opérationnel, le chemin de fer devrait permettre de réduire considérablement les coûts de transport à destination et en provenance de Mombasa.

UNE TACHE ARDUE

Bien que de grandes opportunités puissent naître de la création d'une zone de libre-échange continentale, l'Afrique fait face à un défi de taille pour ce qui est de mettre en œuvre la ZLEC. La volonté politique des gouvernements doit être soutenue par des efforts pour matérialiser ce sur quoi les nations se sont accordées, selon des analystes.

Les négociations sur les régimes douaniers devraient être longues en raison des tendances protectionnistes de certains pays.

Gerishon Ikiara, professeur d'économie à l'Université de Nairobi, au Kenya, a soutenu que puisque les négociations entrent dans leur phases finales, il est essentiel de s'assurer que tous les sujets de préoccupation ou de réserve des économies membres reçoivent toute l'attention nécessaire.

Les ministres africains en charge du commerce devraient se rencontrer dans la capitale ougandaise Kampala début juin pour discuter des instruments de soutien de la ZLEC, y compris les règles d'origine, les calendriers des concessions tarifaires sur le commerce de marchandises, la surveillance des barrières non tarifaires en ligne et le mécanisme d'élimination.

Les ministres transmettront leurs conclusions aux dirigeants africains pour approbation lorsqu'ils se rencontreront à la réunion de l'UA en juillet.

COOPERATION CHINE-AFRIQUE

Selon un document de travail sur l'intégration commerciale en Afrique subsaharienne publié par la Banque mondiale en mai, un environnement extérieur favorable caractérisé par les prix élevés des produits de base, l'émergence de la Chine en tant que partenaire commercial et d'investissement important et un afflux massif de capitaux étrangers ont contribué à stimuler la croissance dans la région au cours des deux dernières décennies.

Des observateurs indiquent que la ZLEC renforcera probablement les liens commerciaux et politiques entre l'Afrique et le monde. La coopération entre l'Afrique et la Chine devrait également être approfondie.

Il existe déjà des forums de coopération entre la Chine et l'Afrique, notamment le Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA) qui se réunit périodiquement pour renforcer les liens.

Lors du Sommet du FCSA à Beijing en 2018, la Chine a annoncé la mise en œuvre de huit initiatives majeures avec des pays africains, dont la promotion industrielle, la connectivité des infrastructures, la facilitation commerciale et le développement vert.

Selon M. Ikiara, de nombreux projets financés par la Chine sont mis en œuvre par le biais du FCSA.

Il a indiqué que l'Initiative "la Ceinture et la Route" proposée par la Chine serait également importante pour le développement futur de l'Afrique.

"Cela aura un impact positif (...) en termes d'intégration des économies africaines entre elles et avec le reste du monde", a conclu M. Ikiara.

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