La Chine devra faire preuve de flexibilité et d'innovation pour faire face à ses défis (INTERVIEW)

French.xinhuanet.com|Publié le 2018-06-23 à 16:00
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PARIS, 21 juin (Xinhua) -- Avec un taux de croissance qui est l'un des plus élevés au monde, même s'il s'est un peu ralenti ces dernières années, la Chine demeure toujours le principal moteur de la croissance du monde, a déclaré Daniel Haber, spécialiste français des économies asiatiques, lors d'une interview récemment accordée à Xinhua, tout en appelant le géant asiatique à faire preuve de flexibilité, de qualité et d'innovation pour faire face aux défis de son développement.

"La Chine est la deuxième plus grande économie du monde, mais son revenu moyen par habitant est inférieur à 10.000 dollars par an, loin de tous les membres de l'OCDE, le groupe des "pays développés", rappelle ce docteur en économie qui préside France Pacific Consultants, un cabinet-conseil spécialisé dans le développement international.

Préférant qualifier la Chine de "pays intermédiaire" en terme de revenu par habitant, même si elle est "un véritable pouvoir économique quand on regarde les grands nombres", M. Haber met l'accent sur l'importance de l'économie chinoise qui constitue, selon lui, le principal moteur de la croissance dans le monde.

La Banque mondiale est toujours optimiste au sujet de l'économie chinoise, maintenant inchangée ses prévisions de croissance à 6,5% pour 2018. Selon elle, "l'activité économique en Chine reste robuste, avec une croissance du PIB de 6,9% en 2017 et de 6,8% en glissement annuel au premier trimestre 2018. La consommation continue à stimuler la croissance".

"Ce qui déjà fait de la Chine une grande puissance économique, c'est la qualité de ses infrastructures, la taille et la performance de ses industries, les énormes actifs de ses banques et de ses compagnies d'assurance", observe Daniel Haber, avant d'ajouter que le pays dispose des plus importantes réserves financières publiques, de puissants fonds souverains qui investissent dans le futur et d'une monnaie forte, même si elle n'est pas encore convertible.

Selon l'expert français, ce qui est vraiment impressionnant aujourd'hui, c'est le dynamisme de ses investissements à l'étranger, faisant de la Chine un acteur international majeur dans la plupart des secteurs.

Le ministère chinois du Commerce a annoncé ce mois que le pays avait réalisé au cours des cinq premiers mois de l'année des investissements d'un montant de 47,89 milliards de dollars dans 2.987 sociétés réparties dans 149 pays, soit hausse de 38,5% par rapport à la même période en 2017.

Pourtant, M. Haber souligne que la Chine est également confrontée aux mêmes multiples défis au cours de son développement que d'autres pays.

Selon lui, comme ailleurs, les inégalités existent toujours en Chine et se sont accrues avec une croissance élevée. La difficulté est de générer une classe moyenne plus grande, signe d'une véritable maturité. Et le principal obstacle est le vieillissement du peuple chinois.

"Cela arrive aussi en Allemagne et au Japon", rappelle-t-il, "en raison d'un taux de natalité trop faible. Mais ce qui est négatif pour la Chine, c'est que le vieillissement apparaît avant que la Chine ne devienne riche". Or, les prestations sociales, comme dans les pays matures (sécurité sociale, assistance chômage, retraite), sont difficiles à mettre en place lorsque le ratio actifs/retraités diminue et que la croissance n'est plus aussi forte qu'avant.

D'après Daniel Haber, la seule solution permettant à la Chine d'améliorer cette situation et de réduire le taux de pauvreté est de maintenir une croissance solide, de renforcer le système éducatif en commençant par les très jeunes élèves et d'augmenter le savoir-faire de la main-d'œuvre.

Par ailleurs, les déséquilibres économiques entre les différentes régions sont réels dans le monde et appellent des efforts énergiques et des décisions prudentes de la part des autorités centrales, met-il en garde. En Chine, de nombreux changements ont été faits pour réduire ces déséquilibres grâce aux infrastructures de communication et de transport. Les zones industrielles se sont déplacées vers l'ouest, les capitales régionales (comme Chengdu et Chongqing) sont devenues des mégapoles et nombre de villes moyennes bien organisées permettent aux Chinois d'y trouver tout ce qu'ils attendent de la vie urbaine moderne.

Enfin, la Chine doit faire face aux mêmes défis auxquels sont confrontés les pays matures : le changement est si rapide que le modèle économique doit constamment s'adapter.

Dans ce contexte, la seule réponse est la flexibilité et la créativité. Le "vrai défi" pour la Chine, c'est "de passer à une qualité supérieure, à un contenu innovant plus élevé", dit-il.

A ses yeux, si l'Etat est nécessaire pour montrer les orientations à long terme et allouer les ressources publiques au bon endroit et au bon moment, seuls des entrepreneurs dynamiques et risqués, avec leur capacité flexible, peuvent chercher des innovations à l'échelle mondiale et les amener dans leur entreprise pour qu'elles s'y adaptent constamment.

"Par conséquent, les pays qui peuvent combiner un gouvernement intelligent (avec ses perspectives à long terme et ses ressources financières) avec un bassin de talents entrepreneuriaux et des sociétés bien gérées réussiront", prédit l'économiste français.

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