Tchad: le système éducatif dans un piteux état (SYNTHESE)
Publié le 2018-06-23 à 03:20 | french.xinhuanet.com
N'DJAMENA, 22 juin (Xinhua) -- Le système éducatif tchadien est en pleine déliquescence et miné par de multiples problèmes, selon une enquête parlementaire présentée cette semaine à l'Assemblée nationale et qui propose un plan de redressement en urgence.
Des missions parlementaires ont été dépêchées début 2018 dans les 23 régions pour constater de visu les réalités sur le terrain. Les résultats des auditions faites au niveau central, doublés de ceux recueillis au cours des descentes sur le terrain, ont non seulement confirmé le diagnostic du système éducatif tchadien, mais ont surtout démontré que la situation frise la catastrophe.
Outre le manque récurrent et criard d'enseignants et de matériels didactiques décrié à tous les niveaux, le système éducatif se heurte à un véritable goulot d'étranglement, nuisible à son rendement optimal.
Il s'agit principalement de la mauvaise gouvernance, matérialisée par un pilotage et une navigation à vue, aggravés par de multiples interférences politiques. Il ne dispose d'aucune banque de données statistiques fiables, moins encore de carte scolaire, cet outil indispensable à l'administration et à la planification rationnelle de la gestion.
Le rapport relève également le cumul des fautes de gestion des ressources humaines et matérielles. "On ne sait plus qui est qui et qui fait quoi à l'école, ni le sérieux des investissements colossaux. Un système censé prodiguer et défendre les valeurs de droiture, d'efficacité, du travail bien fait, regorge finalement des enseignants et des gestionnaires sans éthique et morale", déplorent les auteurs du rapport.
Par ailleurs, le contrôle du système éducatif échappe aux pouvoirs publics. L'on assiste ces dernières années à une prolifération d'établissements privés qui ne respectent ni programmes, ni instructions officielles. "Des +kalwa+ (écoles coraniques, ndlr) développent des agendas cachés risquant de mettre à mal, tôt ou tard, la cohésion nationale", a prévenu M. Moussa Kadam, premier vice-président de l'Assemblée nationale du Tchad et président de la commission d'enquête parlementaire.
"En outre, la démission de l'Etat a offert une occasion en or à de gens véreux de s'engouffrer dans la brèche pour faire prospérer leurs affaires. Ils ont détourné l'école de sa mission régalienne et sans scrupule, l'ont transformée en officine à sous", a-t-il ajouté.
La conjonction des différentes causes handicape fortement le fonctionnement du système éducatif et limite également son offre de sorte qu'actuellement au moins 400 000 enfants en âge scolaire ne fréquentent pas l'école, soit un taux de plus de 12%.
"Il est temps d'agir. Et le meilleur que puisse faire l'Assemblée Nationale, c'est de clamer haut et fort que l'école tchadienne est en panne et abandonnée à son triste sort. Autrement dit, de s'armer de courage pour présenter la réalité dans sa cruelle nudité à l'opinion nationale, paradoxalement après que depuis une décennie, des moyens colossaux et conséquents aient été consentis par le gouvernement", a insisté M. Kadam.
Pour l'Assemblée nationale qui examine le rapport depuis lundi, l'école tchadienne a besoin d'un plan Marshall résumée en 22 résolutions et 28 recommandations, incluant notamment réalisation d'un audit institutionnel et organisationnel du secteur, restauration de la carte scolaire et universitaire, mise en place du Conseil supérieur de l'éducation et des académies avant la rentrée scolaire 2018-2019, redéploiement des enseignants concentrés à N'Djaména (de 60% à 30%) dans les provinces, fermeture immédiate de tous les établissements scolaires et universitaires n'obéissant pas aux normes de qualité requises, avant août 2018, augmentation de la part du budget du secteur de l'éducation à hauteur de 18% du budget de l'Etat (hors dette) à partir de 2019 et de la part des dépenses de fonctionnement non salariale d'au moins 20% par an, etc.