France : des agriculteurs du Grand Est bloquent le dépôt de carburant du Port autonome de Strasbourg (PAPIER GENERAL)
Publié le 2018-06-11 à 23:05 | french.xinhuanet.com
STRASBOURG, 11 juin (Xinhua) -- A l'appel de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), une centaine d'agriculteurs du Grand Est de la France bloquent depuis dimanche soir le dépôt de carburant du Port autonome de Strasbourg afin de dénoncer l'importation massive d'huile de palme destinée à alimenter la bio-raffinerie de la Mède (Bouches-du-Rhône, Sud de la France).
Le blocage du dépôt de carburant du Port autonome de Strasbourg s'inscrit dans la stratégie d'occupation de sites clés d'hydrocarbures dont Dunkerque (Nord), Lyon (Rhône, Est), Gennevilliers (Hauts-de-seine, banlieu de Paris) et Toulouse (Garonne, Sud-ouest).
Des milliers d'agriculteurs, venus avec leurs tracteurs, sont décidés à camper plusieurs jours devant ces sites d'hydrocarbure à l'appel de la FNSEA.
La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) proteste contre l'autorisation donnée à l'entreprise Total de transformer dans sa bio-raffinerie de la Mède (Bouches-du-Rhône). Hormis les huiles usagées, la raffinerie de la Mède produira des biocarburants à base d'huile de palme.
Les besoins de la raffinerie sont estimés à quelque 650.000 tonnes de matières premières par an, dont 300.000 tonnes d'huile de palme importée. Début juin, le PDG de Total, Patrick Pouyanné, a promis l'utilisation de 50.000 tonnes de colza français.
Cependant, selon la FNSEA, l'importation massive d'huile de palme en provenance d'Indonésie et de Malaisie constitue une menace pour les agriculteurs français car les huiles de colza ou de tournesol coûtent plus chères que l'huile de palme importée.
Le projet de fabrication de biocarburant dans la raffinerie de la Mède a été décidé en 2015. Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement français, explique que l'Etat ne peut se dédire de l'accord sur l'importation d'huile de palme pour cette raffinerie.
Aux yeux du principal syndicat agricole, la FNSEA, il s'agit au contraire d'une concurrence déloyale car la filière colza française pourrait produire suffisamment d'oléagineux pour le fonctionnement de la raffinerie.
Avec le slogan #SauvezLesAgris, la FNSEA souhaite mobiliser l'opinion et accuse le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, de trahir ses engagements. Les agriculteurs bénéficient du soutient des écologistes préoccupés par l'impact écologique de la production d'agrocarburant.
Selon l'association de défense de l'environnement Greenpeace, "ceux-ci sont responsables de trois fois plus d'émissions de gaz à effet de serre que les carburants fossiles".
Selon les chercheurs du CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), l'huile de palme serait responsable de 2,3% de la déforestation mondiale.
Le député français au Parlement européen, l'écologiste Yannick Jadot (EELV), soutient le mouvement des agriculteurs mais rappelle que la production massive de colza a un impact écologique désastreux, notamment sur les abeilles et les ressources en eau en raison de l'utilisation massive d'engrais et de produits phytosanitaires.
Le 16 mai dernier au micro de RMC, le ministre Nicolas Hulot s'est défendu en expliquant que "les choses ne peuvent pas êtres réglés en un an" car il s'agit aussi de maintenir 450 emplois à la raffinerie de la Mède.
"J'ai demandé à Total de limiter l'approvisionnement en huile de palme brut à un volume inférieur à 50%, soit au plus 300.000 tonnes par an", avait-il alors indiqué. Mais ces annonces n'ont pas calmé la colère des agriculteurs.
Les paysans attendent avec impatience une future directive de l'Union européenne qui devrait exiger la fin de l'usage d'huile de palme dans les carburants d'ici 2021.
Selon le Journal du dimanche, la France bloquerait secrètement cette directive pour ne pas cabrer l'Indonésie et la Malaisie, grands producteurs d'huile de palme mais également clients potentiels d'équipements militaires français.