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Le stock de plutonium japonais inquiète un spécialiste d'Oxford

Publié le 2015-08-17 à 20:35 | french.xinhuanet.com

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NEW YORK, 17 août (Xinhua) -- La possession par le Japon d'un énorme stock de plutonium constitue un défi pour le monde entier, estime le Dr Peter Wynn Kirby, spécialiste de l'environnement et du Japon à l'Université d'Oxford, dans un éditorial paru lundi dans le New York Times.

A l'heure où l'on célébrait le 70e anniversaire du bombardement de Nagasaki, le 9 août dernier, le Japon disposait au même moment dans ses réserves plus de 47 tonnes de plutonium de qualité militaire, soit assez pour fabriquer près de 6.000 têtes nucléaires comme celle qui a rasé le port japonais en 1945, écrit le scientifique.

Pauvre en ressources naturelles, le Japon a longtemps dépendu de l'énergie nucléaire. Avant la catastrophe de la centrale de Fukushima consécutive au séisme de 2011, près d'un tiers de l'électricité consommée au Japon était d'origine nucléaire et le gouvernement entendait porter cette part à 50% d'ici 2030.

Les 48 réacteurs nucléaires que compte le pays aujourd'hui fonctionnent à l'uranium, un combustible qui, après combustion, génère de l'uranium appauvri mais aussi du plutonium, une substance hautement radioactive et toxique.

Bien que ces réacteurs aient été fermés après Fukushima, avant une relance timide il y a quelques jours, le Japon entrepose toujours près de onze tonnes de plutonium sur son territoire, le reste dans les centres de retraitement en Grande-Bretagne et en France.

Stocker du plutonium sur le sol nippon peut s'avérer dangereux étant donné la nature sismique de l'archipel ou encore les risques de vol par des terroristes, s'inquiète le Dr Kirby. Or, le Japon vient de relancer il y a quelques jours un premier réacteur, à Sendaï, et quatre autres devraient suivre d'ici l'automne.

En tant que sous-produit de la combustion de l'uranium, le plutonium 239 de qualité militaire peut être produit par des surgénérateurs qui, en théorie, peuvent générer plus d'isotopes fissiles qu'ils n'en consomment, ce qui signifie une chaîne de production continue, note le scientifique. "Mais en pratique, la technologie des surgénérateurs est difficile à appliquer. Elle est notoirement défectueuse et coûte les yeux de la tête".

Beaucoup de pays, dont la France et les Etats-Unis, ont essayé de se lancer dans les surgénérateurs, avant de les abandonner progressivement dans les années 1980-90. Mais pas le Japon, souligne Peter Kirby, qui a continué d'investir massivement dans cette technologie.

Alors que le Japon a un bilan déplorable en matière de déchets nucléaires, aucun autre pays au monde n'a trouvé de solution économiquement viable et sûre pour réutiliser ces déchets et certainement pas le plutonium, écrit le scientifique. Etant donné la fragilité géologique du Japon, aucun déchet ne devrait y être entreposé et "le Japon devrait même payer ses plus proches alliés pour lui enlever ses déchets de façon permanente".

A l'heure actuelle, la Grande-Bretagne et la France détiennent respectivement 20 et 16 tonnes de plutonium japonais, qu'elles doivent lui renvoyer une fois retraitées en combustible réutilisable. Ce combustible, et tous ses sous-produits, doivent revenir au Japon d'ici 2020.

"Le Japon devrait plutôt les payer généreusement pour que le plutonium reste là où il est, dans un centre de stockage provisoire sûr. Et il devrait financer la construction de centres de stockage permanents en France et en Grande-Bretagne" ou encore payer les Etats-Unis pour qu'ils lui débarrassent des onze tonnes stockées au Japon, demande l'universitaire.

"Gérer le plutonium japonais serait une lourde charge pour les pays d'accueil et le Japon devrait se montrer très généreux financièrement. Et pourtant ces dépenses ne représenteraient qu'une infime fraction de ce qu'il dépense dans des infrastructures (de surgénération) inefficaces", affirme Kirby.

Libérer le Japon de son stock de plutonium, et donc prévenir une catastrophe nucléaire en cas de séisme, serait dans l'intérêt de la planète, conclut-il.

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