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"Je ne suis ni une gueuse, ni envieuse, ni haineuse" : Nadine, 48 ans, "gilet jaune" (PORTRAIT)

 
French.xinhuanet.com | Publié le 2019-01-19 à 22:01

PARIS, 19 janvier (Xinhua) -- Nadine, 48 ans, séparée, deux enfants, connaît un quotidien difficile. Cette travailleuse précaire, sans engagement politique ni syndical, s'est récemment confié à Xinhua, expliquant les raisons qui l'ont poussée à rejoindre le mouvement des "gilets jaunes" afin de "reconquérir ses droits de citoyenne".

"A 30 ans, je vivais mieux qu'aujourd'hui. Je payais des impôts. J'avais confiance dans l'avenir. Que j'aimerais être imposable de nouveau (...)", avoue-t-elle avec une pointe de tristesse dans la voix. "Je ne suis ni une gueuse, ni envieuse, ni haineuse", lâche-t-elle.

"Désormais, j'ai le sentiment de faire moins bien que mes parents et je m'inquiète pour le futur de mes enfants. Au sentiment de déclassement social s'ajoute le manque de reconnaissance professionnelle", confie cette Savoyarde qui dit gagner 700 euros net par mois.

Face à la hausse des factures de gaz, d'électricité, d'eau, d'alimentation, d'assurances, d'automobile, de complémentaires santé, elle se sent "prise à la gorge. Je dois compter pour tout. Si je n'étais pas propriétaire de mon logement, je ne sais pas comment j'y arriverais", avoue cette mère de famille.

"Les indicateurs macroéconomiques qui affirment que la situation s'est améliorée, je ne sais pas comment ils sont calculés, mais ils ne correspondent pas à la réalité que j'observe tous les jours", lâche Nadine, un brin désabusée.

Titulaire d'une maîtrise d'anglais, cette native de Haute-Savoie a réussi le concours d'assistante de conservation en 2003, avant d'avoir deux enfants aujourd'hui âgés de 16 et 15 ans.

"J'étais pleine d'enthousiasme, j'aimais mon métier. J'ai travaillé comme bibliothécaire adjointe au patrimoine jusqu'en 2015, même quand mes enfants étaient en bas-âge. Comme j'étais à temps partiel en raison de mes contraintes familiales et que les dotations de l'Etat dans la fonction publique territoriale ont diminué, je n'ai jamais pu bénéficier d'un statut sécurisant. J'ai fini par décider de me reconvertir", explique-t-elle.

Devenue avec succès conseillère funéraire, des problèmes de santé l'ont contrainte à travailler désormais à temps partiel en tant qu'aide à domicile. "Face à une vie de plus en plus chère, un salaire de misère", résume Nadine. "La hausse des carburants, c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, mais la grogne est beaucoup plus profonde. Je fais partie de cette majorité silencieuse et invisible qui réclame haut et fort d'être entendue, reconnue et respectée", dit-elle avec calme.

"Depuis le 17 novembre, sur les ronds-points, j'ai rencontré des Français de tous horizons : des artisans, des agents de la fonction publique, des retraités, des professeurs des écoles et du secondaire (...) Grâce aux contacts humains, nous essayons de refaire société. Nous sommes tous des porte-paroles", explique Nadine qui se méfie des figures médiatiques des "gilets jaunes" qu'elle ne juge pas représentatifs.

Pour cette fille de gendarme, le mouvement des "gilets jaunes" est avant tout "une prise de conscience collective et une révolte contre l'injustice sociale". Partisane d'une VIe République, elle assure avoir toujours voté, "mais jamais pour l'extrême droite", en réponse à ceux qui craignent une récupération du mouvement par le Rassemblement national de Marine Le Pen.

Interrogée sur l'avenir de cette mobilisation inédite et protéiforme née sur les réseaux sociaux, elle note que les "gilets jaunes" n'ont pas de chef et n'en veulent pas. "C'est à la fois la force et la faiblesse du mouvement qui, politiquement, doit trouver sa voix", admet Nadine.

Quant au débat national lancé par le président Emmanuel Macron, elle n'en attend "pas grand chose". "La Macronie est la quintessence de l'oligarchie et de l'entre-soi. Faire de la pédagogie pour nous faire croire au bien-fondé d'une politique ultra-libérale qui crée de la richesse pour tous : foutaises!", conclut-elle.

 
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"Je ne suis ni une gueuse, ni envieuse, ni haineuse" : Nadine, 48 ans, "gilet jaune" (PORTRAIT)

French.xinhuanet.com | Publié le 2019-01-19 à 22:01

PARIS, 19 janvier (Xinhua) -- Nadine, 48 ans, séparée, deux enfants, connaît un quotidien difficile. Cette travailleuse précaire, sans engagement politique ni syndical, s'est récemment confié à Xinhua, expliquant les raisons qui l'ont poussée à rejoindre le mouvement des "gilets jaunes" afin de "reconquérir ses droits de citoyenne".

"A 30 ans, je vivais mieux qu'aujourd'hui. Je payais des impôts. J'avais confiance dans l'avenir. Que j'aimerais être imposable de nouveau (...)", avoue-t-elle avec une pointe de tristesse dans la voix. "Je ne suis ni une gueuse, ni envieuse, ni haineuse", lâche-t-elle.

"Désormais, j'ai le sentiment de faire moins bien que mes parents et je m'inquiète pour le futur de mes enfants. Au sentiment de déclassement social s'ajoute le manque de reconnaissance professionnelle", confie cette Savoyarde qui dit gagner 700 euros net par mois.

Face à la hausse des factures de gaz, d'électricité, d'eau, d'alimentation, d'assurances, d'automobile, de complémentaires santé, elle se sent "prise à la gorge. Je dois compter pour tout. Si je n'étais pas propriétaire de mon logement, je ne sais pas comment j'y arriverais", avoue cette mère de famille.

"Les indicateurs macroéconomiques qui affirment que la situation s'est améliorée, je ne sais pas comment ils sont calculés, mais ils ne correspondent pas à la réalité que j'observe tous les jours", lâche Nadine, un brin désabusée.

Titulaire d'une maîtrise d'anglais, cette native de Haute-Savoie a réussi le concours d'assistante de conservation en 2003, avant d'avoir deux enfants aujourd'hui âgés de 16 et 15 ans.

"J'étais pleine d'enthousiasme, j'aimais mon métier. J'ai travaillé comme bibliothécaire adjointe au patrimoine jusqu'en 2015, même quand mes enfants étaient en bas-âge. Comme j'étais à temps partiel en raison de mes contraintes familiales et que les dotations de l'Etat dans la fonction publique territoriale ont diminué, je n'ai jamais pu bénéficier d'un statut sécurisant. J'ai fini par décider de me reconvertir", explique-t-elle.

Devenue avec succès conseillère funéraire, des problèmes de santé l'ont contrainte à travailler désormais à temps partiel en tant qu'aide à domicile. "Face à une vie de plus en plus chère, un salaire de misère", résume Nadine. "La hausse des carburants, c'est la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, mais la grogne est beaucoup plus profonde. Je fais partie de cette majorité silencieuse et invisible qui réclame haut et fort d'être entendue, reconnue et respectée", dit-elle avec calme.

"Depuis le 17 novembre, sur les ronds-points, j'ai rencontré des Français de tous horizons : des artisans, des agents de la fonction publique, des retraités, des professeurs des écoles et du secondaire (...) Grâce aux contacts humains, nous essayons de refaire société. Nous sommes tous des porte-paroles", explique Nadine qui se méfie des figures médiatiques des "gilets jaunes" qu'elle ne juge pas représentatifs.

Pour cette fille de gendarme, le mouvement des "gilets jaunes" est avant tout "une prise de conscience collective et une révolte contre l'injustice sociale". Partisane d'une VIe République, elle assure avoir toujours voté, "mais jamais pour l'extrême droite", en réponse à ceux qui craignent une récupération du mouvement par le Rassemblement national de Marine Le Pen.

Interrogée sur l'avenir de cette mobilisation inédite et protéiforme née sur les réseaux sociaux, elle note que les "gilets jaunes" n'ont pas de chef et n'en veulent pas. "C'est à la fois la force et la faiblesse du mouvement qui, politiquement, doit trouver sa voix", admet Nadine.

Quant au débat national lancé par le président Emmanuel Macron, elle n'en attend "pas grand chose". "La Macronie est la quintessence de l'oligarchie et de l'entre-soi. Faire de la pédagogie pour nous faire croire au bien-fondé d'une politique ultra-libérale qui crée de la richesse pour tous : foutaises!", conclut-elle.

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