France : controverse autour du projet de loi contre les "fake news" (SYNTHESE)

Publié le 2018-06-10 à 03:05 | french.xinhuanet.com

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PARIS, 9 juin (Xinhua) -- Le projet de loi du gouvernement français sur les fausses informations ("fake news" en anglais) publiées sur Internet, notamment en période électorale, dont le vote était prévu jeudi dernier avant d'être renvoyé à une date ultérieure, a récemment suscité de vives critiques de la part de l'opposition et aussi inquiété des spécialistes et défenseurs des droits en France.

Les critiques et les interrogations portent notamment sur la définition ambigüe de la notion de fausse information, qualifiée dans la nouvelle version du texte "d'allégation ou imputation d'un fait inexacte, ou trompeuse", et sur la possibilité d'un recours devant le juge des référés contre une fausse information "de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir".

Un recours qui oblige ainsi le juge à se prononcer dans un délai de 48h sur la nature de l'information diffusée et à ordonner, s'il s'agit d'un fake news, le retrait du contenu, le blocage du site ou la désactivation des comptes sur les réseaux sociaux.

Le renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) d'"empêcher, suspendre ou mettre fin" à la diffusion de services de télévision "sous l'influence d'un Etat étranger qui porte atteinte aux intérêts de la nation" prévu par le projet de loi est également au centre de la controverse.

Les pourfendeurs de la loi, notamment les opposants, qualifient ce projet de loi de liberticide et de tentative de contrôle sur l'information.

"Si cette proposition est votée, les valeurs les plus essentielles que consacre notre Constitution, et, plus profondément, les valeurs de la démocratie, seront bafouées", prévient Marine Le Pen, dans une Tribune publiée sur Causeur.

Car, d'après la présidente du parti d'extrême droite Rassemblement national, nouveau nom du Front National, "telle que définie dans le projet de loi, la fausse information couvre un champ d'application beaucoup trop large, disons-le, liberticide".

Pour le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, le parti d'extrême gauche, "il ne s'agit de rien d'autre que d'une grossière tentative de contrôle sur l'information et les moyens de celle-ci".

Le président du groupe parlementaire Les Républicains (LR), Christian Jacob a également dénoncé une mise en place "de la police de la pensée" parlant de cette loi.

En plus des opposants, le projet de loi contre les "fake news" inquiète également des spécialistes du droit, de la presse et défenseurs des droits qui s'interrogent sur son utilité.

Pierre Haski, journaliste et président de Reporter sans frontière (RSF) a estimé que l'efficacité de ce projet est discutable.

"Cette loi comporte des vrais risques, non pas d'abus liberticides, mais d'effets pervers dans sa mise en œuvre", a-t-il expliqué dans une interview au journal le Parisien.

Le syndicat national des journalistes (SNJ) avait déjà alerté en mars dernier sur le risque de menace de la liberté d'expression et la liberté d'informer, que fait courir cette loi, faisant notamment allusion au renforcement des pouvoirs de la CSA. Le SNJ a qualifié ainsi ce texte de "dangereux et inefficace".

Cette inquiétude des acteurs de la presse est accompagnée des interrogations que soulèvent les spécialistes du droit sur le sujet.

Le professeur des universités à Sciences Po, Dominique Reynié a affirmé dans le Figaro être "étonné et sceptique quant à ce que ce texte peut apporter", en renvoyant à la loi de 1881 qui statue déjà sur le délit de fausse nouvelle.

La Commission consultative des Droits de l'homme a également réagi en indiquant dans une déclaration que "l'étendue des pouvoirs de police administrative ainsi confiés au CSA menace de porter atteinte au pluralisme des médias (...)".

Thierry Paul Valette, fondateur du mouvement "l'Egalité nationale", a expliqué sur la chaîne RT France qu'il soupçonnait à travers cette loi une volonté de stigmatiser certains médias "qui n'appartiennent pas toujours au bloc occidental comme on l'entend".

Ces critiques et inquiétudes ont été balayées par le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Selon lui ce projet vise plutôt à lutter contre la manipulation de l'information, notamment en période électorale, afin de "mieux exercer la démocratie".

"On peut avoir des Etats étrangers, des groupes terroristes, des milliardaires excentriques, qui paient des contenus, les sponsorisent, pour déverser des tombereaux d'injures sur des candidats, quels qu'ils soient", a-t-il indiqué sur France Inter pour justifier le recours à un juge.

french.xinhuanet.com

France : controverse autour du projet de loi contre les "fake news" (SYNTHESE)

Publié le 2018-06-10 à 03:05 | french.xinhuanet.com

PARIS, 9 juin (Xinhua) -- Le projet de loi du gouvernement français sur les fausses informations ("fake news" en anglais) publiées sur Internet, notamment en période électorale, dont le vote était prévu jeudi dernier avant d'être renvoyé à une date ultérieure, a récemment suscité de vives critiques de la part de l'opposition et aussi inquiété des spécialistes et défenseurs des droits en France.

Les critiques et les interrogations portent notamment sur la définition ambigüe de la notion de fausse information, qualifiée dans la nouvelle version du texte "d'allégation ou imputation d'un fait inexacte, ou trompeuse", et sur la possibilité d'un recours devant le juge des référés contre une fausse information "de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir".

Un recours qui oblige ainsi le juge à se prononcer dans un délai de 48h sur la nature de l'information diffusée et à ordonner, s'il s'agit d'un fake news, le retrait du contenu, le blocage du site ou la désactivation des comptes sur les réseaux sociaux.

Le renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) d'"empêcher, suspendre ou mettre fin" à la diffusion de services de télévision "sous l'influence d'un Etat étranger qui porte atteinte aux intérêts de la nation" prévu par le projet de loi est également au centre de la controverse.

Les pourfendeurs de la loi, notamment les opposants, qualifient ce projet de loi de liberticide et de tentative de contrôle sur l'information.

"Si cette proposition est votée, les valeurs les plus essentielles que consacre notre Constitution, et, plus profondément, les valeurs de la démocratie, seront bafouées", prévient Marine Le Pen, dans une Tribune publiée sur Causeur.

Car, d'après la présidente du parti d'extrême droite Rassemblement national, nouveau nom du Front National, "telle que définie dans le projet de loi, la fausse information couvre un champ d'application beaucoup trop large, disons-le, liberticide".

Pour le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, le parti d'extrême gauche, "il ne s'agit de rien d'autre que d'une grossière tentative de contrôle sur l'information et les moyens de celle-ci".

Le président du groupe parlementaire Les Républicains (LR), Christian Jacob a également dénoncé une mise en place "de la police de la pensée" parlant de cette loi.

En plus des opposants, le projet de loi contre les "fake news" inquiète également des spécialistes du droit, de la presse et défenseurs des droits qui s'interrogent sur son utilité.

Pierre Haski, journaliste et président de Reporter sans frontière (RSF) a estimé que l'efficacité de ce projet est discutable.

"Cette loi comporte des vrais risques, non pas d'abus liberticides, mais d'effets pervers dans sa mise en œuvre", a-t-il expliqué dans une interview au journal le Parisien.

Le syndicat national des journalistes (SNJ) avait déjà alerté en mars dernier sur le risque de menace de la liberté d'expression et la liberté d'informer, que fait courir cette loi, faisant notamment allusion au renforcement des pouvoirs de la CSA. Le SNJ a qualifié ainsi ce texte de "dangereux et inefficace".

Cette inquiétude des acteurs de la presse est accompagnée des interrogations que soulèvent les spécialistes du droit sur le sujet.

Le professeur des universités à Sciences Po, Dominique Reynié a affirmé dans le Figaro être "étonné et sceptique quant à ce que ce texte peut apporter", en renvoyant à la loi de 1881 qui statue déjà sur le délit de fausse nouvelle.

La Commission consultative des Droits de l'homme a également réagi en indiquant dans une déclaration que "l'étendue des pouvoirs de police administrative ainsi confiés au CSA menace de porter atteinte au pluralisme des médias (...)".

Thierry Paul Valette, fondateur du mouvement "l'Egalité nationale", a expliqué sur la chaîne RT France qu'il soupçonnait à travers cette loi une volonté de stigmatiser certains médias "qui n'appartiennent pas toujours au bloc occidental comme on l'entend".

Ces critiques et inquiétudes ont été balayées par le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Selon lui ce projet vise plutôt à lutter contre la manipulation de l'information, notamment en période électorale, afin de "mieux exercer la démocratie".

"On peut avoir des Etats étrangers, des groupes terroristes, des milliardaires excentriques, qui paient des contenus, les sponsorisent, pour déverser des tombereaux d'injures sur des candidats, quels qu'ils soient", a-t-il indiqué sur France Inter pour justifier le recours à un juge.

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