On ne peut plus envisager aujourd'hui une stratégie d'entreprise sans IA, selon un spécialiste français (INTERVIEW)

Publié le 2018-04-05 à 18:20 | french.xinhuanet.com

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PARIS, 5 avril (Xinhua) -- "On ne peut plus envisager aujourd'hui une stratégie d'entreprise sans Intelligence Artificielle (IA)", a indiqué Yves Pizay, Senior Partner de chez Kea & Partners à Xinhua lors d'une récente interview, soulignant le fait que les entreprises "traditionnelles" ne pourraient faire l'impasse sur l'IA à terme.

Interrogé sur les récentes annonces faites par le gouvernement français en matière de financements et de formations dans le domaine de l'IA, le spécialiste français a salué la qualité du rapport Villani remis à Emmanuel Macron. Il regrette cependant que ces promesses aient, selon lui, "peu évolué" depuis les précédentes annonces en mars 2017. "J'ai trouvé le rapport excellent, avec une vision cohérente globale systémique, mais en revanche, j'ai été déçu par les annonces faites car il y a peu de nouveautés par rapport à l'an passé et l'investissement global est maintenu à 1,5 milliard d'euros, ce qui reste trop peu par rapport aux besoins de la France".

Cet investissement, dont 400 millions seront consacrés aux appels à projets à destination des laboratoires de recherche, fait partie des dix milliards d'euros attribué au Fonds pour l'innovation et l'industrie dédié aux "technologies de ruptures" annoncé en début d'année par le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire.

Le 29 mars, le président français avait également évoqué la nécessité de soutenir la formation dans le domaine de l'IA, annonçant vouloir renforcer les filières : "écoles de mathématiques, d'ingénierie, d'intelligence artificielle, de data scientists, de façon à doubler le nombres d'étudiants dans le supérieur".

Yves Pizay a estimé que la "grande visibilité médiatique" accordée au rapport présenté hier est une bonne chose. "La bonne nouvelle est qu'on assiste aujourd'hui à un réveil des dirigeants français". Selon lui, il y a des entreprises "précurseurs" en France qui s'appuient sur des technologies essentiellement américaines, "comme le Crédit Mutuel et Orange qui utilisent le logiciel américain de deep learning Watson", a-t-il expliqué.

Actuellement, de grands chercheurs français en IA travaillent pour des sociétés étrangères, comme c'est le cas de Yann LeCun, employé par Facebook, qui estime que "nous avons une fuite de nos cerveaux". Les deux secteurs actuels les mieux dotés en logiciels d'IA sont la banque et la grande distribution, selon l'expert français.

Dans le secteur bancaire, toutes les entreprises développent des logiciels d'IA pour la relation client, les conseils personnalisés sur les produits et la fraude. "Aujourd'hui, des sociétés proposent des logiciels plus performants que les humains pour détecter les fraudes bancaires et aux assurances", a souligné Yves Pizay.

La tendance se développe dans la grande distribution, comme le prouve l'annonce récente de Monoprix expliquant que le groupe va intégrer les supports de vente d'Amazon. "Le marketing ciblé est d'ailleurs l'un des secteurs qui a le plus recours aux logiciels fonctionnant avec l'IA", a rappelé le spécialiste.

Malgré son retard, l'Union européenne dispose d'un atout pour le spécialiste français : sa commissaire au Numérique, Mariya Gabriel, nommée l'été dernier, "qui veut agir et qui a compris que la 'data' doit être protégée". "Elle a une vision économique et éthique qui s'inscrit dans la vision démocratique inventée par l'UE", a-t-il estimé.

Toutefois, il a affirmé que l'Union européenne est très en retard sur le secteur de l'IA, derrière la Chine et les Etats-Unis. "La Chine a déjà commencé à investir depuis longtemps dans l'IA, elle a réussi à faire sortir de terre des géants du digital qui eux-mêmes ont certes repris des recettes des GAFA américaines, mais sont aussi parvenus à se développer avec les moyens nécessaires à ce marché gigantesque", analyse-t-il.

A titre d'exemple, Yves Pizay explique que le gouvernement français avait annoncé vouloir tripler le nombre d'ingénieurs-chercheurs dans le secteur de l'IA, passant de 13.000 personnes (en 2017) à 39.000. Or, l'entreprise chinoise Tencent a récemment fait savoir que 15.000 de ses salariés étaient employés en IA. "Nous ne sommes clairement pas la hauteur", a-t-il indiqué.

Pour lui, l'investissement en France dans le domaine de l'IA est "disséminé et morcelé entre entreprises qui gagneraient à mettre en commun leurs connaissances". "En revanche, la génération des dirigeants qui arrivent actuellement à la tête des entreprises a vécu avec des ordinateurs et donc comprend comment cela fonctionne, ce qui est un élément très positif".

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On ne peut plus envisager aujourd'hui une stratégie d'entreprise sans IA, selon un spécialiste français (INTERVIEW)

Publié le 2018-04-05 à 18:20 | french.xinhuanet.com

PARIS, 5 avril (Xinhua) -- "On ne peut plus envisager aujourd'hui une stratégie d'entreprise sans Intelligence Artificielle (IA)", a indiqué Yves Pizay, Senior Partner de chez Kea & Partners à Xinhua lors d'une récente interview, soulignant le fait que les entreprises "traditionnelles" ne pourraient faire l'impasse sur l'IA à terme.

Interrogé sur les récentes annonces faites par le gouvernement français en matière de financements et de formations dans le domaine de l'IA, le spécialiste français a salué la qualité du rapport Villani remis à Emmanuel Macron. Il regrette cependant que ces promesses aient, selon lui, "peu évolué" depuis les précédentes annonces en mars 2017. "J'ai trouvé le rapport excellent, avec une vision cohérente globale systémique, mais en revanche, j'ai été déçu par les annonces faites car il y a peu de nouveautés par rapport à l'an passé et l'investissement global est maintenu à 1,5 milliard d'euros, ce qui reste trop peu par rapport aux besoins de la France".

Cet investissement, dont 400 millions seront consacrés aux appels à projets à destination des laboratoires de recherche, fait partie des dix milliards d'euros attribué au Fonds pour l'innovation et l'industrie dédié aux "technologies de ruptures" annoncé en début d'année par le ministre français de l'Economie, Bruno Le Maire.

Le 29 mars, le président français avait également évoqué la nécessité de soutenir la formation dans le domaine de l'IA, annonçant vouloir renforcer les filières : "écoles de mathématiques, d'ingénierie, d'intelligence artificielle, de data scientists, de façon à doubler le nombres d'étudiants dans le supérieur".

Yves Pizay a estimé que la "grande visibilité médiatique" accordée au rapport présenté hier est une bonne chose. "La bonne nouvelle est qu'on assiste aujourd'hui à un réveil des dirigeants français". Selon lui, il y a des entreprises "précurseurs" en France qui s'appuient sur des technologies essentiellement américaines, "comme le Crédit Mutuel et Orange qui utilisent le logiciel américain de deep learning Watson", a-t-il expliqué.

Actuellement, de grands chercheurs français en IA travaillent pour des sociétés étrangères, comme c'est le cas de Yann LeCun, employé par Facebook, qui estime que "nous avons une fuite de nos cerveaux". Les deux secteurs actuels les mieux dotés en logiciels d'IA sont la banque et la grande distribution, selon l'expert français.

Dans le secteur bancaire, toutes les entreprises développent des logiciels d'IA pour la relation client, les conseils personnalisés sur les produits et la fraude. "Aujourd'hui, des sociétés proposent des logiciels plus performants que les humains pour détecter les fraudes bancaires et aux assurances", a souligné Yves Pizay.

La tendance se développe dans la grande distribution, comme le prouve l'annonce récente de Monoprix expliquant que le groupe va intégrer les supports de vente d'Amazon. "Le marketing ciblé est d'ailleurs l'un des secteurs qui a le plus recours aux logiciels fonctionnant avec l'IA", a rappelé le spécialiste.

Malgré son retard, l'Union européenne dispose d'un atout pour le spécialiste français : sa commissaire au Numérique, Mariya Gabriel, nommée l'été dernier, "qui veut agir et qui a compris que la 'data' doit être protégée". "Elle a une vision économique et éthique qui s'inscrit dans la vision démocratique inventée par l'UE", a-t-il estimé.

Toutefois, il a affirmé que l'Union européenne est très en retard sur le secteur de l'IA, derrière la Chine et les Etats-Unis. "La Chine a déjà commencé à investir depuis longtemps dans l'IA, elle a réussi à faire sortir de terre des géants du digital qui eux-mêmes ont certes repris des recettes des GAFA américaines, mais sont aussi parvenus à se développer avec les moyens nécessaires à ce marché gigantesque", analyse-t-il.

A titre d'exemple, Yves Pizay explique que le gouvernement français avait annoncé vouloir tripler le nombre d'ingénieurs-chercheurs dans le secteur de l'IA, passant de 13.000 personnes (en 2017) à 39.000. Or, l'entreprise chinoise Tencent a récemment fait savoir que 15.000 de ses salariés étaient employés en IA. "Nous ne sommes clairement pas la hauteur", a-t-il indiqué.

Pour lui, l'investissement en France dans le domaine de l'IA est "disséminé et morcelé entre entreprises qui gagneraient à mettre en commun leurs connaissances". "En revanche, la génération des dirigeants qui arrivent actuellement à la tête des entreprises a vécu avec des ordinateurs et donc comprend comment cela fonctionne, ce qui est un élément très positif".

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