"A Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là" (INTERVIEW)

Publié le 2018-03-17 à 22:24 | french.xinhuanet.com

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STRASBOURG, 17 mars (Xinhua) -- Au lendemain de la visite de la chancelière allemande Angela Merkel vendredi à Paris, le politologue Stefan Seidendorf, directeur adjoint de l'Institut franco-allemand (DFI), estime dans une interview accordée à Xinhua, qu'"à Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là".

Depuis les élections allemandes de septembre dernier, la "refondation" de l'Union européenne prônée par le président français Emmanuel Macron restait suspendue aux négociations qui ont finalement permis, mercredi, à Mme Merkel de constituer son gouvernement.

Les deux dirigeants ont affiché vendredi soir, lors d'une conférence de presse conjointe à Paris, volontarisme et optimisme, annonçant une feuille de route "claire et ambitieuse" sur l'union économique et monétaire, en insistant sur la "responsabilité extrêmement importante" du couple franco-allemand.

"A Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là", estime M. Seidendorf.

"Depuis plus de six mois, Emmanuel Macron attendait une réponse de l'Allemagne. Pendant ce temps, des contacts étroits se sont maintenus au niveau des administrations, le travail a continué. La synthèse des différentes propositions est là, facilement mobilisable. Désormais, cela va bouger. Le gouvernement allemand n'a pas intérêt à laisser traîner les choses", relève-t-il.

"On observe une vraie prise de conscience : le temps presse. Un scrutin important pour la CDU (le parti de Mme Merkel) aura lieu en Bavière cet automne, sans parler bien sûr des élections européennes l'an prochain", poursuit-il. "D'ici l'été, il faudrait que les premiers compromis se dessinent et que le calendrier des réformes soit mis en place", ajoute-il.

Le sommet européen des 22 et 23 mars s'annonce comme un point d'étape avant le Conseil européen de la fin juin qui sera crucial.

Selon le politologue, "le contrat de gouvernement de la grande coalition allemande est beaucoup plus ouvert que tout ce qu'on a pu entendre par le passé".

"La marge de manœuvre de Mme Merkel est beaucoup plus grande que dans le dernier gouvernement. Les six derniers mois ont contraint les différentes formations politiques en Allemagne à clarifier leur position sur les questions européennes. Les conservateurs comprennent eux aussi qu'il faut changer la donne", considère le directeur adjoint de cet institut basé à Ludwigsburg (sud-ouest de l'Allemagne).

Interrogé par Xinhua quant à l'amélioration des indicateurs économiques en France, Stefan Seidendorf souligne "l'effet psychologique" que cela produit outre-Rhin. "Cela rassure indéniablement les Allemands et donne une impulsion. Les acteurs économiques que j'ai rencontrés cette semaine sont presque enthousiastes, peut-être même surinterprètent-ils les chiffres car la France revient de loin...", poursuit-il.

"Emmanuel Macron a clairement bien compris qu'en rassurant et en faisant appel au rôle franco-allemand, cela oblige les Allemands à réagir. Ils ne peuvent pas se soustraire à la coopération franco-allemande", ajoute-t-il.

Certes, nuance-t-il, "il n'y a pas encore de position arrêtée, ni de ligne rouge clairement définie".

"Concernant le plus grand chantier, celui de la réforme de la zone euro, on voit bien que la question de la communautarisation de la dette est le plus gros problème. C'est très certainement sur ce point que va se dessiner la ligne rouge dans les négociations". "La dette existante est celle qui fait le plus peur aux Allemands. Les conservateurs ne veulent pas payer pour les dettes des autres pays", rappelle-t-il.

"Mais tout le monde a conscience qu'il faut trouver des solutions pour garantir une meilleure stabilité de la zone euro. Telle qu'elle est aujourd'hui, elle ne pourrait pas sauver l'Italie - qui est dans une situation très difficile avec sa dette souveraine - comme elle l'a fait avec la Grèce. On va se mettre d'accord sur un instrument commun, la volonté est là", juge le politologue.

Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, qui a reçu vendredi son nouvel homologue Olaf Scholz, s'est dit confiant que les "difficultés techniques" qui freinent un accord sur des sujets comme l'union bancaire pourraient être surmontées d'ici la fin juin.

La question d'un budget d'investissement de la zone euro voulu par M. Macron va elle aussi "venir sur la table", relève le politologue. "Le traité de coalition laisse ouvert cette possibilité. La question récurrente, c'est de savoir comment trouver le mécanisme à mettre en oeuvre. Pour gérer ce budget, les positions des uns et des autres sont encore très divergentes", dit-il.

Interrogé par Xinhua sur l'éventualité d'un ministre des Finances de la zone euro, Stefan Seidendorf rappelle que "c'est une vieille idée française". "Si cela consiste à donner un titre à un autre fonctionnaire bruxellois sans qu'il ait de véritables prérogatives, cela n'aurait guère de sens. Si c'est plus ambitieux, cela risque d'être très compliqué pour les Français comme pour les Allemands", commente-t-il.

Autre dossier épineux dans les relations franco-allemandes, "l'harmonisation de l'impôt sur les entreprises - une priorité pour les Français - s'avère très compliqué sur le plan technique", souligne le politologue. "On en parle depuis 2001. Une unité de travail franco-allemande sur ce dossier existe toujours, mais les systèmes développés au niveau national depuis le XIXe siècle sont très différents", ajoute-t-il.

"Il serait prometteur de trouver une approche commune et une nouvelle régulation pour la nouvelle économie face aux problématiques que posent notamment les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon). Jusqu'ici, l'Allemagne a tenté de trouver des solutions nationales. Mais il me semble évident que pour que ce soit efficace, cela doit être fait à l'échelon européen", conclut-il.

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"A Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là" (INTERVIEW)

Publié le 2018-03-17 à 22:24 | french.xinhuanet.com

STRASBOURG, 17 mars (Xinhua) -- Au lendemain de la visite de la chancelière allemande Angela Merkel vendredi à Paris, le politologue Stefan Seidendorf, directeur adjoint de l'Institut franco-allemand (DFI), estime dans une interview accordée à Xinhua, qu'"à Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là".

Depuis les élections allemandes de septembre dernier, la "refondation" de l'Union européenne prônée par le président français Emmanuel Macron restait suspendue aux négociations qui ont finalement permis, mercredi, à Mme Merkel de constituer son gouvernement.

Les deux dirigeants ont affiché vendredi soir, lors d'une conférence de presse conjointe à Paris, volontarisme et optimisme, annonçant une feuille de route "claire et ambitieuse" sur l'union économique et monétaire, en insistant sur la "responsabilité extrêmement importante" du couple franco-allemand.

"A Berlin comme à Paris, la volonté politique de faire avancer la réforme de l'UE est là", estime M. Seidendorf.

"Depuis plus de six mois, Emmanuel Macron attendait une réponse de l'Allemagne. Pendant ce temps, des contacts étroits se sont maintenus au niveau des administrations, le travail a continué. La synthèse des différentes propositions est là, facilement mobilisable. Désormais, cela va bouger. Le gouvernement allemand n'a pas intérêt à laisser traîner les choses", relève-t-il.

"On observe une vraie prise de conscience : le temps presse. Un scrutin important pour la CDU (le parti de Mme Merkel) aura lieu en Bavière cet automne, sans parler bien sûr des élections européennes l'an prochain", poursuit-il. "D'ici l'été, il faudrait que les premiers compromis se dessinent et que le calendrier des réformes soit mis en place", ajoute-il.

Le sommet européen des 22 et 23 mars s'annonce comme un point d'étape avant le Conseil européen de la fin juin qui sera crucial.

Selon le politologue, "le contrat de gouvernement de la grande coalition allemande est beaucoup plus ouvert que tout ce qu'on a pu entendre par le passé".

"La marge de manœuvre de Mme Merkel est beaucoup plus grande que dans le dernier gouvernement. Les six derniers mois ont contraint les différentes formations politiques en Allemagne à clarifier leur position sur les questions européennes. Les conservateurs comprennent eux aussi qu'il faut changer la donne", considère le directeur adjoint de cet institut basé à Ludwigsburg (sud-ouest de l'Allemagne).

Interrogé par Xinhua quant à l'amélioration des indicateurs économiques en France, Stefan Seidendorf souligne "l'effet psychologique" que cela produit outre-Rhin. "Cela rassure indéniablement les Allemands et donne une impulsion. Les acteurs économiques que j'ai rencontrés cette semaine sont presque enthousiastes, peut-être même surinterprètent-ils les chiffres car la France revient de loin...", poursuit-il.

"Emmanuel Macron a clairement bien compris qu'en rassurant et en faisant appel au rôle franco-allemand, cela oblige les Allemands à réagir. Ils ne peuvent pas se soustraire à la coopération franco-allemande", ajoute-t-il.

Certes, nuance-t-il, "il n'y a pas encore de position arrêtée, ni de ligne rouge clairement définie".

"Concernant le plus grand chantier, celui de la réforme de la zone euro, on voit bien que la question de la communautarisation de la dette est le plus gros problème. C'est très certainement sur ce point que va se dessiner la ligne rouge dans les négociations". "La dette existante est celle qui fait le plus peur aux Allemands. Les conservateurs ne veulent pas payer pour les dettes des autres pays", rappelle-t-il.

"Mais tout le monde a conscience qu'il faut trouver des solutions pour garantir une meilleure stabilité de la zone euro. Telle qu'elle est aujourd'hui, elle ne pourrait pas sauver l'Italie - qui est dans une situation très difficile avec sa dette souveraine - comme elle l'a fait avec la Grèce. On va se mettre d'accord sur un instrument commun, la volonté est là", juge le politologue.

Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, qui a reçu vendredi son nouvel homologue Olaf Scholz, s'est dit confiant que les "difficultés techniques" qui freinent un accord sur des sujets comme l'union bancaire pourraient être surmontées d'ici la fin juin.

La question d'un budget d'investissement de la zone euro voulu par M. Macron va elle aussi "venir sur la table", relève le politologue. "Le traité de coalition laisse ouvert cette possibilité. La question récurrente, c'est de savoir comment trouver le mécanisme à mettre en oeuvre. Pour gérer ce budget, les positions des uns et des autres sont encore très divergentes", dit-il.

Interrogé par Xinhua sur l'éventualité d'un ministre des Finances de la zone euro, Stefan Seidendorf rappelle que "c'est une vieille idée française". "Si cela consiste à donner un titre à un autre fonctionnaire bruxellois sans qu'il ait de véritables prérogatives, cela n'aurait guère de sens. Si c'est plus ambitieux, cela risque d'être très compliqué pour les Français comme pour les Allemands", commente-t-il.

Autre dossier épineux dans les relations franco-allemandes, "l'harmonisation de l'impôt sur les entreprises - une priorité pour les Français - s'avère très compliqué sur le plan technique", souligne le politologue. "On en parle depuis 2001. Une unité de travail franco-allemande sur ce dossier existe toujours, mais les systèmes développés au niveau national depuis le XIXe siècle sont très différents", ajoute-t-il.

"Il serait prometteur de trouver une approche commune et une nouvelle régulation pour la nouvelle économie face aux problématiques que posent notamment les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon). Jusqu'ici, l'Allemagne a tenté de trouver des solutions nationales. Mais il me semble évident que pour que ce soit efficace, cela doit être fait à l'échelon européen", conclut-il.

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