"De nouvelles percées économiques et culturelles se dessinent entre Beijing, Paris et l'UE" (expert)(INTERVIEW)

Publié le 2018-01-11 à 02:37 | french.xinhuanet.com

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PARIS, 10 janvier (Xinhua) -- Dans un entretien accordé à Xinhua, Emmanuel Dupuy, président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE) et professeur invité au sein de la Zhejiang Wanli University & du Ningbo Maritime Silk Road Institute (Ningbo, Chine), analyse les nouvelles percées économiques, culturelles et stratégiques qui se dessinent dans la relation entre Beijing, Paris et l'Union européenne (UE), à l'issue de la visite du président français Emmanuel Macron en Chine qui s'est terminée mercredi.

"Au-delà des accords dans les secteurs particulièrement stratégiques que sont le nucléaire, l'électricité, l'aéronautique qui ont été signés mardi entre la Chine et la France, il convient de relever que de nouvelles percées ont été effectuées dans des domaines qui dépassent les domaines traditionnels de coopération. D'autres perspectives se sont ouvertes", estime Emmanuel Dupuy.

Parmi les accords les plus significatifs actés lors de la visite du président Macron - accompagné d'une cinquantaine de chefs d'entreprises françaises (dont les dirigeants d'Areva, Airbus, Safran et d'EDF) - dans l'Empire du Milieu, l'universitaire insiste sur le protocole signé entre New Areva et le groupe chinois China National Nuclear Corporation (CNNC) en vue de construire une usine de traitement-recyclage en Chine pour quelque 10 milliards d'euros, et la mise en service du premier réacteur nucléaire EPR de Taishan - annoncée par l'Elysée pour la mi-2018 - qui "confirment que la coopération en matière de nucléaire civil pourra être très utile".

"La Chine s'est d'autre part engagée à lever dans les six mois l'embargo sur la viande bovine française qu'elle imposait depuis 2001 à la suite de la crise de la vache folle. Le secteur agroalimentaire est l'un de ceux où un partenariat est particulièrement bénéfique autant à la Chine qu'à la France (et à l'UE) puisque la Chine, premier importateur de produits agricoles européens, représente 10% des terres agricoles mondiales et 20% de la population mondiale", relève le président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE).

"Emmanuel Macron est perçu par Beijing comme le porte-parole d'un leadership européen, notamment en raison du Brexit et de la crise politique allemande. Si la France avec ses 66 millions d'habitants est un marché somme toute assez petit pour la Chine (les investissements chinois en France s'élèvent à quelque 9 milliards d'euros mais ne représentent que 1% des investissements directs étrangers), l'UE représente quant à elle un quart du commerce international et un tiers de la balance commerciale mondiale. Cela en fait des partenaires naturels d'autant qu'on estime qu'à l'horizon 2032 la Chine aura dépassé l'économie américaine", souligne l'universitaire.

"Le succès de la visite du président français est également le fruit d'un bon timing. Elle est arrivée à point nommé. Emmanuel Macron est le premier leader européen à s'être rendu en Chine après le 19e congrès du Parti communiste chinois. Il récolte les fruits d'un agenda tout à fait favorable, à un moment où les Etats-Unis, en raison de leur position sur le climat et leur décision concernant Jérusalem notamment, apparaissent de plus et plus comme un problème", poursuit-il.

Selon Emmanuel Dupuy, cette visite "confirme l'ancrage et l'importance des entreprises françaises en Chine qui sont au nombre de 1100. Avec 600 000 personnes employées en Chine, la France est le deuxième employeur européen en Chine, et le deuxième fournisseur du pays après l'Allemagne". Il relève la "diversité des entreprises présentes dans la délégation française". Et de citer: "Le domaine du luxe avec LVMH, des groupes de la grande distribution comme Carrefour, Auchan, mais aussi le secteur du tourisme d'avenir avec Accor, Club Med, ou encore Décathlon qui a ouvert sa centième boutique en Chine... Autant de secteurs où la Chine manifeste de l'intérêt pour les produits français".

Le géant chinois de la vente en ligne JD.com, qui s'est engagé mardi à vendre sur ses plateformes pour 2 milliards d'euros de produits français à ses millions d'usagers, sur les deux prochaines années, tout en se disant prêt à s'implanter en France, et Alibaba, le leader du commerce électronique en Chine, qui envisage de créer un centre logistique en France sont des "signes très clairs de l'intérêt réciproque des deux pays dans ce secteur en pleine expansion", ajoute l'universitaire.

Emmanuel Dupuy relève également les progrès réalisés en matière de coopération culturelle: "La France, qui avait besoin de montrer qu'elle était un partenaire fiable, avait besoin de symboles forts. Le partenariat pour établir un Centre Pompidou d'art contemporain à Shanghai est une très bonne chose. Tout comme la mobilisation autour de la protection du patrimoine et l'approfondissement de la coopération notamment dans le domaine archéologique".

Interrogé par Xinhua sur le nouveau protocole d'accord signé par Bpifrance, China Development Bank et Cathay Capital dans le but de créer le successeur du premier fonds Sino French (Midcap) Fund lancé en 2014, le professeur invité au sein de la Zhejiang Wanli University & du Ningbo Maritime Silk Road Institute déclare que "cela confirme le potentiel de convergence des entreprises françaises et chinoises".

"De plus en plus de responsables politiques français au plus haut niveau s'intéressent à la Chine. Mais le dynamisme n'existe pas seulement au niveau des Etats. La coopération entre la France et la Chine implique désormais beaucoup d'acteurs, entreprises, collectivités locales... ", poursuit-il. Avant d'ajouter: "Reste cependant un obstacle à lever: la différence de fonds et d'investissements. Cela pose la question de l'équilibre. Les investissements chinois en Europe ont augmenté de 77% durant l'année 2016 alors que les investissements directs européens ont diminué de 23%", dit-il.

"Pour confirmer le statut d'économie de marché auquel la Chine a droit (après 15 ans d'appartenance à l'OMC elle y a statutairement droit), l'examen des contrats bilatéraux entre l'UE et la Chine va devoir aussi se faire sous le signe de l'équilibre, en matière d'ouverture des marchés, des droits de douane... dans toute une série de secteurs", commente-t-il.

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"De nouvelles percées économiques et culturelles se dessinent entre Beijing, Paris et l'UE" (expert)(INTERVIEW)

Publié le 2018-01-11 à 02:37 | french.xinhuanet.com

PARIS, 10 janvier (Xinhua) -- Dans un entretien accordé à Xinhua, Emmanuel Dupuy, président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE) et professeur invité au sein de la Zhejiang Wanli University & du Ningbo Maritime Silk Road Institute (Ningbo, Chine), analyse les nouvelles percées économiques, culturelles et stratégiques qui se dessinent dans la relation entre Beijing, Paris et l'Union européenne (UE), à l'issue de la visite du président français Emmanuel Macron en Chine qui s'est terminée mercredi.

"Au-delà des accords dans les secteurs particulièrement stratégiques que sont le nucléaire, l'électricité, l'aéronautique qui ont été signés mardi entre la Chine et la France, il convient de relever que de nouvelles percées ont été effectuées dans des domaines qui dépassent les domaines traditionnels de coopération. D'autres perspectives se sont ouvertes", estime Emmanuel Dupuy.

Parmi les accords les plus significatifs actés lors de la visite du président Macron - accompagné d'une cinquantaine de chefs d'entreprises françaises (dont les dirigeants d'Areva, Airbus, Safran et d'EDF) - dans l'Empire du Milieu, l'universitaire insiste sur le protocole signé entre New Areva et le groupe chinois China National Nuclear Corporation (CNNC) en vue de construire une usine de traitement-recyclage en Chine pour quelque 10 milliards d'euros, et la mise en service du premier réacteur nucléaire EPR de Taishan - annoncée par l'Elysée pour la mi-2018 - qui "confirment que la coopération en matière de nucléaire civil pourra être très utile".

"La Chine s'est d'autre part engagée à lever dans les six mois l'embargo sur la viande bovine française qu'elle imposait depuis 2001 à la suite de la crise de la vache folle. Le secteur agroalimentaire est l'un de ceux où un partenariat est particulièrement bénéfique autant à la Chine qu'à la France (et à l'UE) puisque la Chine, premier importateur de produits agricoles européens, représente 10% des terres agricoles mondiales et 20% de la population mondiale", relève le président de l'Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE).

"Emmanuel Macron est perçu par Beijing comme le porte-parole d'un leadership européen, notamment en raison du Brexit et de la crise politique allemande. Si la France avec ses 66 millions d'habitants est un marché somme toute assez petit pour la Chine (les investissements chinois en France s'élèvent à quelque 9 milliards d'euros mais ne représentent que 1% des investissements directs étrangers), l'UE représente quant à elle un quart du commerce international et un tiers de la balance commerciale mondiale. Cela en fait des partenaires naturels d'autant qu'on estime qu'à l'horizon 2032 la Chine aura dépassé l'économie américaine", souligne l'universitaire.

"Le succès de la visite du président français est également le fruit d'un bon timing. Elle est arrivée à point nommé. Emmanuel Macron est le premier leader européen à s'être rendu en Chine après le 19e congrès du Parti communiste chinois. Il récolte les fruits d'un agenda tout à fait favorable, à un moment où les Etats-Unis, en raison de leur position sur le climat et leur décision concernant Jérusalem notamment, apparaissent de plus et plus comme un problème", poursuit-il.

Selon Emmanuel Dupuy, cette visite "confirme l'ancrage et l'importance des entreprises françaises en Chine qui sont au nombre de 1100. Avec 600 000 personnes employées en Chine, la France est le deuxième employeur européen en Chine, et le deuxième fournisseur du pays après l'Allemagne". Il relève la "diversité des entreprises présentes dans la délégation française". Et de citer: "Le domaine du luxe avec LVMH, des groupes de la grande distribution comme Carrefour, Auchan, mais aussi le secteur du tourisme d'avenir avec Accor, Club Med, ou encore Décathlon qui a ouvert sa centième boutique en Chine... Autant de secteurs où la Chine manifeste de l'intérêt pour les produits français".

Le géant chinois de la vente en ligne JD.com, qui s'est engagé mardi à vendre sur ses plateformes pour 2 milliards d'euros de produits français à ses millions d'usagers, sur les deux prochaines années, tout en se disant prêt à s'implanter en France, et Alibaba, le leader du commerce électronique en Chine, qui envisage de créer un centre logistique en France sont des "signes très clairs de l'intérêt réciproque des deux pays dans ce secteur en pleine expansion", ajoute l'universitaire.

Emmanuel Dupuy relève également les progrès réalisés en matière de coopération culturelle: "La France, qui avait besoin de montrer qu'elle était un partenaire fiable, avait besoin de symboles forts. Le partenariat pour établir un Centre Pompidou d'art contemporain à Shanghai est une très bonne chose. Tout comme la mobilisation autour de la protection du patrimoine et l'approfondissement de la coopération notamment dans le domaine archéologique".

Interrogé par Xinhua sur le nouveau protocole d'accord signé par Bpifrance, China Development Bank et Cathay Capital dans le but de créer le successeur du premier fonds Sino French (Midcap) Fund lancé en 2014, le professeur invité au sein de la Zhejiang Wanli University & du Ningbo Maritime Silk Road Institute déclare que "cela confirme le potentiel de convergence des entreprises françaises et chinoises".

"De plus en plus de responsables politiques français au plus haut niveau s'intéressent à la Chine. Mais le dynamisme n'existe pas seulement au niveau des Etats. La coopération entre la France et la Chine implique désormais beaucoup d'acteurs, entreprises, collectivités locales... ", poursuit-il. Avant d'ajouter: "Reste cependant un obstacle à lever: la différence de fonds et d'investissements. Cela pose la question de l'équilibre. Les investissements chinois en Europe ont augmenté de 77% durant l'année 2016 alors que les investissements directs européens ont diminué de 23%", dit-il.

"Pour confirmer le statut d'économie de marché auquel la Chine a droit (après 15 ans d'appartenance à l'OMC elle y a statutairement droit), l'examen des contrats bilatéraux entre l'UE et la Chine va devoir aussi se faire sous le signe de l'équilibre, en matière d'ouverture des marchés, des droits de douane... dans toute une série de secteurs", commente-t-il.

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