France: "Le FN renoue avec un de ses vieux démons, celui de la division" (INTERVIEW)

Publié le 2017-09-25 à 23:49 | french.xinhuanet.com

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PARIS, 25 septembre (Xinhua) -- Alors que Marine Le Pen a débuté samedi une tournée des fédérations du Front national (FN), deux jours après la démission de son lieutenant Florian Philippot, l'historienne spécialiste de l'extrême droite, Valérie Igounet, analyse, dans une interview accordée à Xinhua, la crise que traverse le parti après la défaite de sa candidate à l'élection présidentielle.

"La démission de Florian Philippot n'est pas une surprise; on s'y attendait depuis un moment. Il était devenu indésirable, tout comme sa ligne idéologique qui était désormais incompatible", déclare l'historienne spécialiste de l'extrême droite, Valérie Igounet, qui a publié en 2014 une histoire du front national "Le Front national : de 1972 à nos jours : le parti, les hommes, les idées".

"Le Front national est confronté à ce qu'il est : un parti dont l'histoire est parsemée de crises, de scissions, etc. avec un élément essentiel: celui de la préférence familiale. Gilbert Collard (ndlr: député FN du Gard, figure du parti) l'a d'ailleurs mis lui-même en avant: la démission de Florian Philippot, je le cite, traduit une "fracture relationnelle plutôt qu'une divergence de vues"". "Le FN est un parti où la famille prime", résume-t-elle.

Florian Philippot, après s'être réclamé du gaullisme et du souverainisme pendant les années 2000, avait adhéré au FN en 2011 au sein duquel il était devenu un conseiller influent de Marine Le Pen dont il a accompagné l'ascension. Mais les critiques à son encontre se sont multipliées après l'échec de la candidate d'extrême droite au second tour de la présidentielle en mai dernier et la contre-performance du parti Front national aux élections législatives de juin.

Après sa démission, jeudi, du parti dont il était, depuis 2012, l'un des principaux stratèges, "la fin du compagnonnage Le Pen-Philippot est définitivement actée. Nombre d'observateurs et de cadres du FN (anciens et actuels) reviennent sur cet épisode en se remémorant les différentes crises dans l'histoire du Front national. Le FN renoue avec un de ses vieux démons, celui de la division, et revit un énième épisode de l'affrontement entre un Le Pen et un numéro deux", explique la chercheuse associée à l'Institut du Temps Présent (CNRS).

"C'est une histoire qui commence quasiment aux débuts du FN. La dissolution d'Ordre nouveau (ON), le 28 juin 1973, l'annonce. Pour Jean-Marie Le Pen, le constat est simple: ON - à l'origine de la création du FN - se montre beaucoup trop intrusif et commence à faire de l'ombre au FN. Il faut donc se débarrasser de ce courant. La stratégie du président du parti passe par l'éviction de son numéro deux. Pour justifier sa position, Jean-Marie Le Pen invoque le refus d'Alain Robert de démissionner du poste de secrétaire général d'ON afin de rester à la même fonction au FN", rappelle l'universitaire.

La place de Florian Philippot, énarque de 36 ans partisan de l'abandon de l'euro, au sein du parti dominé depuis sa création, en 1971, par la dynastie Le Pen, était devenue intenable après l'échec de la candidate du FN face à Emmanuel Macron. Le député européen et conseiller régional du Grand Est avait d'ailleurs crée sa propre association baptisée "Les Patriotes" en mai dernier.

"Le rôle de Philippot dans l'ascension de Marine Le Pen a certes été important mais il ne faut pas oublier qu'elle était bien ancrée au sein du FN dès les années 2000", précise Valérie Igounet qui a également signé avec le photographe Vincent Jarrousseau, "L'illusion nationale", ouvrage paru au printemps issu de deux ans d'enquête dans des villes gérées par le Front National.

Interrogée par Xinhua sur les conséquences de la démission de Florian Philippot sur la ligne idéologique du FN, Valérie Igounet répond que "son départ laisse de la place aux historiques du FN" et qu'il "aura du mal à concurrencer le FN". Elle rejette le terme de "séisme politique" utilisé par certains éditorialistes de l'Hexagone, soulignant que le choc provoqué, à la fin des années 90, par le départ de Bruno Mégret, l'ancien bras droit de Jean-Marie le Pen en compagnie d'une grande partie des cadres du parti, était sans commune mesure.

Concernant Marion-Maréchal Le Pen, qui a elle aussi pris ses distances avec la patronne du FN, elle "observe" ce qui se passe dans le parti d'extrême droite mais aussi dans les rangs de la droite et attend de voir qui sera élu à la tête des Républicains. La très populaire nièce de la présidente du FN, Marion-Maréchal Le Pen a renoncé à se représenter en juin aux législatives. Elle soutient une nouvelle publication mensuelle baptisée L'incorrect centrée sur la défense des valeurs et une économie "bleu-blanc-rouge".

Samedi, Marine Le Pen, en inaugurant à Toulouse une tournée des fédérations du parti qui comportera douze étapes (soit environ deux par mois) a annoncé une "refondation tout à fait historique" de l'organisation du FN. "La question est de savoir quels sont les marqueurs que le parti va mettre en avant. Mais il ne faut pas oublier que le logiciel du FN a toujours été l'immigration", estime Valérie Igounet.

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France: "Le FN renoue avec un de ses vieux démons, celui de la division" (INTERVIEW)

Publié le 2017-09-25 à 23:49 | french.xinhuanet.com

PARIS, 25 septembre (Xinhua) -- Alors que Marine Le Pen a débuté samedi une tournée des fédérations du Front national (FN), deux jours après la démission de son lieutenant Florian Philippot, l'historienne spécialiste de l'extrême droite, Valérie Igounet, analyse, dans une interview accordée à Xinhua, la crise que traverse le parti après la défaite de sa candidate à l'élection présidentielle.

"La démission de Florian Philippot n'est pas une surprise; on s'y attendait depuis un moment. Il était devenu indésirable, tout comme sa ligne idéologique qui était désormais incompatible", déclare l'historienne spécialiste de l'extrême droite, Valérie Igounet, qui a publié en 2014 une histoire du front national "Le Front national : de 1972 à nos jours : le parti, les hommes, les idées".

"Le Front national est confronté à ce qu'il est : un parti dont l'histoire est parsemée de crises, de scissions, etc. avec un élément essentiel: celui de la préférence familiale. Gilbert Collard (ndlr: député FN du Gard, figure du parti) l'a d'ailleurs mis lui-même en avant: la démission de Florian Philippot, je le cite, traduit une "fracture relationnelle plutôt qu'une divergence de vues"". "Le FN est un parti où la famille prime", résume-t-elle.

Florian Philippot, après s'être réclamé du gaullisme et du souverainisme pendant les années 2000, avait adhéré au FN en 2011 au sein duquel il était devenu un conseiller influent de Marine Le Pen dont il a accompagné l'ascension. Mais les critiques à son encontre se sont multipliées après l'échec de la candidate d'extrême droite au second tour de la présidentielle en mai dernier et la contre-performance du parti Front national aux élections législatives de juin.

Après sa démission, jeudi, du parti dont il était, depuis 2012, l'un des principaux stratèges, "la fin du compagnonnage Le Pen-Philippot est définitivement actée. Nombre d'observateurs et de cadres du FN (anciens et actuels) reviennent sur cet épisode en se remémorant les différentes crises dans l'histoire du Front national. Le FN renoue avec un de ses vieux démons, celui de la division, et revit un énième épisode de l'affrontement entre un Le Pen et un numéro deux", explique la chercheuse associée à l'Institut du Temps Présent (CNRS).

"C'est une histoire qui commence quasiment aux débuts du FN. La dissolution d'Ordre nouveau (ON), le 28 juin 1973, l'annonce. Pour Jean-Marie Le Pen, le constat est simple: ON - à l'origine de la création du FN - se montre beaucoup trop intrusif et commence à faire de l'ombre au FN. Il faut donc se débarrasser de ce courant. La stratégie du président du parti passe par l'éviction de son numéro deux. Pour justifier sa position, Jean-Marie Le Pen invoque le refus d'Alain Robert de démissionner du poste de secrétaire général d'ON afin de rester à la même fonction au FN", rappelle l'universitaire.

La place de Florian Philippot, énarque de 36 ans partisan de l'abandon de l'euro, au sein du parti dominé depuis sa création, en 1971, par la dynastie Le Pen, était devenue intenable après l'échec de la candidate du FN face à Emmanuel Macron. Le député européen et conseiller régional du Grand Est avait d'ailleurs crée sa propre association baptisée "Les Patriotes" en mai dernier.

"Le rôle de Philippot dans l'ascension de Marine Le Pen a certes été important mais il ne faut pas oublier qu'elle était bien ancrée au sein du FN dès les années 2000", précise Valérie Igounet qui a également signé avec le photographe Vincent Jarrousseau, "L'illusion nationale", ouvrage paru au printemps issu de deux ans d'enquête dans des villes gérées par le Front National.

Interrogée par Xinhua sur les conséquences de la démission de Florian Philippot sur la ligne idéologique du FN, Valérie Igounet répond que "son départ laisse de la place aux historiques du FN" et qu'il "aura du mal à concurrencer le FN". Elle rejette le terme de "séisme politique" utilisé par certains éditorialistes de l'Hexagone, soulignant que le choc provoqué, à la fin des années 90, par le départ de Bruno Mégret, l'ancien bras droit de Jean-Marie le Pen en compagnie d'une grande partie des cadres du parti, était sans commune mesure.

Concernant Marion-Maréchal Le Pen, qui a elle aussi pris ses distances avec la patronne du FN, elle "observe" ce qui se passe dans le parti d'extrême droite mais aussi dans les rangs de la droite et attend de voir qui sera élu à la tête des Républicains. La très populaire nièce de la présidente du FN, Marion-Maréchal Le Pen a renoncé à se représenter en juin aux législatives. Elle soutient une nouvelle publication mensuelle baptisée L'incorrect centrée sur la défense des valeurs et une économie "bleu-blanc-rouge".

Samedi, Marine Le Pen, en inaugurant à Toulouse une tournée des fédérations du parti qui comportera douze étapes (soit environ deux par mois) a annoncé une "refondation tout à fait historique" de l'organisation du FN. "La question est de savoir quels sont les marqueurs que le parti va mettre en avant. Mais il ne faut pas oublier que le logiciel du FN a toujours été l'immigration", estime Valérie Igounet.

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