France: onze prétendants à l'Elysée et un clivage majeur entre pro et anti-européens (ANALYSE)

Publié le 2017-04-05 à 20:40 | french.xinhuanet.com

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PARIS, 5 avril (Xinhua) -- Au-delà de quelques passes d'armes sur les affaires, le long débat télévisé inédit qui a opposé mardi soir l'ensemble des candidats à la présidentielle n'a pas permis une véritable confrontation sur les programmes, mais a révélé la profonde facture qui traverse la classe politique et l'opinion publique française sur la question de l'Europe.

A moins de trois semaines du premier tour de scrutin, les onze candidats en lice pour la charge suprême de la République ont participé pour la première fois à une joute télévisée de près de quatre heures diffusée sur CNews et BFMTV. Au menu : les questions centrales de l'emploi, de la sécurité et du social. Mais c'est surtout l'Union européenne qui a provoqué des échanges assez vifs entre les concurrents.

Aux cinq "grands" prétendants à l'Elysée, le socialiste Benoît Hamon, François Fillon (Les Républicains), Emmanuel Macron (En Marche!), Marine Le Pen (Front national), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) se sont joints sur le plateau les six "petits" candidats: Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), François Asselineau (Union populaire républicaine), Jacques Cheminade (Solidarité et progrès), Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), Jean Lassalle (sans étiquette) et Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste).

Les Français ont certes pu découvrir ces "petits" candidats atypiques, parfois farfelus, théâtraux ou provocateurs, mais le format du débat a parfois provoqué une certaine confusion et produit une simplification des discours. Les favoris à l'Elysée avaient plus à perdre qu'à gagner dans l'exercice mais aucun n'a commis de véritable faux pas.

C'est Jean-Luc Mélenchon, le trublion de la gauche radicale, qui semble, comme lors du dernier débat télévisé, avoir tiré son épingle du jeu grâce à ses qualités d'orateur: avec 25% d'opinions favorables, le candidat de La France insoumise aurait convaincu une majorité de Français, selon un sondage Elabe pour BFMTV, devant Emmanuel Macron (21 %) et François Fillon (15 %).

"Je constate que sur les onze candidats, dix approuvent le principe de la construction européenne", a attaqué le souverainiste François Asselineau. "Soit on continue d'enfumer les Français, soit on fait sereinement, juridiquement, comme les Britanniques, la sortie de l'Europe", a prôné le partisan d'un "Frexit".

Dans le contexte économique morose de l'Hexagone, l'UE est régulièrement pointée du doigt comme la responsable de tous les maux de la France et l'euroscepticisme prospère. Seul Emmanuel Macron, fidèle à sa ligne politique, a véritablement pris le risque de promouvoir l'UE, proclamant avoir "l'Europe au cœur", car "elle nous rend fort". Une UE qu'il convient néanmoins de réformer, a-t-il nuancé.

Le débat s'est d'abord cristallisé sur la très controversée directive européenne sur les travailleurs détachés. Cette mesure, qui permet à un employé d'une entreprise dont le siège social est hors de France d'être exonéré de certaines cotisations, est régulièrement dénoncée comme une forme de dumping social.

Marine Le Pen, qui veut la supprimer, s'est fait tacler par Jean-Luc Mélenchon qui lui a rappelé que le FN s'était abstenu lors du vote au Parlement européen. "Le travailleur détaché, ce n'est pas la personne qui est en cause, ce n'est pas sa nationalité qui compte", lui a rétorqué le candidat de La France Insoumise qui souhaite lui aussi supprimer cette directive.

Emmanuel Macron, au coude à coude dans les sondages avec sa rivale d'extrême droite, l'a attaquée en lui demandant comment elle comptait expliquer aux 300.000 Français eux-mêmes détachés qu'ils perdraient leur emploi si sa politique était appliquée. L'ancien ministre de l'Economie a également fustigé le programme du FN qui prévoit la sortie de l'euro. "Je ne veux pas laisser s'installer une espèce de faux débat entre celles et ceux qui protègent les Français en disant 'on sort de l'Europe' et les autres qui seraient pour le laisser-aller. L'Europe permet de protéger", a-t-il asséné.

"Ce que vous proposez, Mme Le Pen, c'est en effet de la baisse de pouvoir d'achat pour les Français, parce qu'avec la sortie de l'euro pour les épargnants, les travailleurs, ce sera une baisse de pouvoir d'achat. Ce que vous proposez, c'est la guerre économique", a insisté Emmanuel Macron.

En chute dans les sondages depuis le PenelopeGate, le candidat de droite François Fillon, qui cherche à se positionner comme le seul candidat capable de redresser la France, en a profité pour renchérir. "Comme on sait tous qu'il y a l'immense majorité de Français qui ne souhaite pas sortir de la monnaie européenne, ça veut dire qu'en réalité, il n'y a pas de politique économique de Mme Le Pen parce que cette politique économique s'effondrera à la minute où les Français se seront prononcés sur la question du maintien dans la monnaie européenne", a-t-il affirmé.

Le socialiste Benoît Hamon, tout en concédant à Jean-Luc Mélenchon qui l'a dépassé dans les intentions de vote, que "l'austérité, ça ne tient plus" dans l'Union européenne, a lancé à son rival de la gauche radicale: "Ça manque de solutions, votre programme sur l'Europe". "C'est la raison pour laquelle ça finira au plan B, c'est ma conviction. Moi, ma conviction c'est que le chemin que vous proposez c'est la sortie de l'euro et de l'Europe", a-t-il ajouté.

"Vous avez gouverné l'Europe avec la droite, donc venez pas me saouler maintenant", lui a répliqué avec virulence l'eurodéputé. Le pacte de non-agression entre les deux hommes semble bien révolu.

D'une façon générale, les échanges musclés sur l'Europe donnent à penser que le clivage entre les pro et les anti-européens est en passe de remplacer l'affrontement traditionnel droite-gauche sur l'échiquier politique français.

Par ailleurs, la séquence, reprise en boucle dans les médias et les réseaux sociaux, du candidat du NPA, Philippe Poutou, accusant François Fillon et Marine Le Pen de "piquer dans les caisses publiques", met en lumière la problématique de la moralisation de la vie politique propulsée au premier plan de la campagne par les affaires.

Selon un sondage Ipsos-Sopra Steria pour France Télévisions et Radio France publié mercredi, 65% des Français estiment que l'honnêteté et la probité sont les qualités les plus importantes pour un président de la République.

"Les Français citent largement en tête des qualités requises pour être président l'honnêteté et la probité (65%), en particulier quand ils se situent à gauche de l'échiquier politique (86% de ceux qui ont l'intention de voter au 1er tour pour Benoît Hamon et 83% de ceux qui pensent voter pour Jean-Luc Mélenchon évoquent cette qualité), bien moins par l'électorat de François Fillon (19%), qui cite en tête la détermination (69% contre 34% de l'ensemble des Français)", détaille Ipsos.

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France: onze prétendants à l'Elysée et un clivage majeur entre pro et anti-européens (ANALYSE)

Publié le 2017-04-05 à 20:40 | french.xinhuanet.com

PARIS, 5 avril (Xinhua) -- Au-delà de quelques passes d'armes sur les affaires, le long débat télévisé inédit qui a opposé mardi soir l'ensemble des candidats à la présidentielle n'a pas permis une véritable confrontation sur les programmes, mais a révélé la profonde facture qui traverse la classe politique et l'opinion publique française sur la question de l'Europe.

A moins de trois semaines du premier tour de scrutin, les onze candidats en lice pour la charge suprême de la République ont participé pour la première fois à une joute télévisée de près de quatre heures diffusée sur CNews et BFMTV. Au menu : les questions centrales de l'emploi, de la sécurité et du social. Mais c'est surtout l'Union européenne qui a provoqué des échanges assez vifs entre les concurrents.

Aux cinq "grands" prétendants à l'Elysée, le socialiste Benoît Hamon, François Fillon (Les Républicains), Emmanuel Macron (En Marche!), Marine Le Pen (Front national), Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) se sont joints sur le plateau les six "petits" candidats: Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), François Asselineau (Union populaire républicaine), Jacques Cheminade (Solidarité et progrès), Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), Jean Lassalle (sans étiquette) et Philippe Poutou (Nouveau Parti anticapitaliste).

Les Français ont certes pu découvrir ces "petits" candidats atypiques, parfois farfelus, théâtraux ou provocateurs, mais le format du débat a parfois provoqué une certaine confusion et produit une simplification des discours. Les favoris à l'Elysée avaient plus à perdre qu'à gagner dans l'exercice mais aucun n'a commis de véritable faux pas.

C'est Jean-Luc Mélenchon, le trublion de la gauche radicale, qui semble, comme lors du dernier débat télévisé, avoir tiré son épingle du jeu grâce à ses qualités d'orateur: avec 25% d'opinions favorables, le candidat de La France insoumise aurait convaincu une majorité de Français, selon un sondage Elabe pour BFMTV, devant Emmanuel Macron (21 %) et François Fillon (15 %).

"Je constate que sur les onze candidats, dix approuvent le principe de la construction européenne", a attaqué le souverainiste François Asselineau. "Soit on continue d'enfumer les Français, soit on fait sereinement, juridiquement, comme les Britanniques, la sortie de l'Europe", a prôné le partisan d'un "Frexit".

Dans le contexte économique morose de l'Hexagone, l'UE est régulièrement pointée du doigt comme la responsable de tous les maux de la France et l'euroscepticisme prospère. Seul Emmanuel Macron, fidèle à sa ligne politique, a véritablement pris le risque de promouvoir l'UE, proclamant avoir "l'Europe au cœur", car "elle nous rend fort". Une UE qu'il convient néanmoins de réformer, a-t-il nuancé.

Le débat s'est d'abord cristallisé sur la très controversée directive européenne sur les travailleurs détachés. Cette mesure, qui permet à un employé d'une entreprise dont le siège social est hors de France d'être exonéré de certaines cotisations, est régulièrement dénoncée comme une forme de dumping social.

Marine Le Pen, qui veut la supprimer, s'est fait tacler par Jean-Luc Mélenchon qui lui a rappelé que le FN s'était abstenu lors du vote au Parlement européen. "Le travailleur détaché, ce n'est pas la personne qui est en cause, ce n'est pas sa nationalité qui compte", lui a rétorqué le candidat de La France Insoumise qui souhaite lui aussi supprimer cette directive.

Emmanuel Macron, au coude à coude dans les sondages avec sa rivale d'extrême droite, l'a attaquée en lui demandant comment elle comptait expliquer aux 300.000 Français eux-mêmes détachés qu'ils perdraient leur emploi si sa politique était appliquée. L'ancien ministre de l'Economie a également fustigé le programme du FN qui prévoit la sortie de l'euro. "Je ne veux pas laisser s'installer une espèce de faux débat entre celles et ceux qui protègent les Français en disant 'on sort de l'Europe' et les autres qui seraient pour le laisser-aller. L'Europe permet de protéger", a-t-il asséné.

"Ce que vous proposez, Mme Le Pen, c'est en effet de la baisse de pouvoir d'achat pour les Français, parce qu'avec la sortie de l'euro pour les épargnants, les travailleurs, ce sera une baisse de pouvoir d'achat. Ce que vous proposez, c'est la guerre économique", a insisté Emmanuel Macron.

En chute dans les sondages depuis le PenelopeGate, le candidat de droite François Fillon, qui cherche à se positionner comme le seul candidat capable de redresser la France, en a profité pour renchérir. "Comme on sait tous qu'il y a l'immense majorité de Français qui ne souhaite pas sortir de la monnaie européenne, ça veut dire qu'en réalité, il n'y a pas de politique économique de Mme Le Pen parce que cette politique économique s'effondrera à la minute où les Français se seront prononcés sur la question du maintien dans la monnaie européenne", a-t-il affirmé.

Le socialiste Benoît Hamon, tout en concédant à Jean-Luc Mélenchon qui l'a dépassé dans les intentions de vote, que "l'austérité, ça ne tient plus" dans l'Union européenne, a lancé à son rival de la gauche radicale: "Ça manque de solutions, votre programme sur l'Europe". "C'est la raison pour laquelle ça finira au plan B, c'est ma conviction. Moi, ma conviction c'est que le chemin que vous proposez c'est la sortie de l'euro et de l'Europe", a-t-il ajouté.

"Vous avez gouverné l'Europe avec la droite, donc venez pas me saouler maintenant", lui a répliqué avec virulence l'eurodéputé. Le pacte de non-agression entre les deux hommes semble bien révolu.

D'une façon générale, les échanges musclés sur l'Europe donnent à penser que le clivage entre les pro et les anti-européens est en passe de remplacer l'affrontement traditionnel droite-gauche sur l'échiquier politique français.

Par ailleurs, la séquence, reprise en boucle dans les médias et les réseaux sociaux, du candidat du NPA, Philippe Poutou, accusant François Fillon et Marine Le Pen de "piquer dans les caisses publiques", met en lumière la problématique de la moralisation de la vie politique propulsée au premier plan de la campagne par les affaires.

Selon un sondage Ipsos-Sopra Steria pour France Télévisions et Radio France publié mercredi, 65% des Français estiment que l'honnêteté et la probité sont les qualités les plus importantes pour un président de la République.

"Les Français citent largement en tête des qualités requises pour être président l'honnêteté et la probité (65%), en particulier quand ils se situent à gauche de l'échiquier politique (86% de ceux qui ont l'intention de voter au 1er tour pour Benoît Hamon et 83% de ceux qui pensent voter pour Jean-Luc Mélenchon évoquent cette qualité), bien moins par l'électorat de François Fillon (19%), qui cite en tête la détermination (69% contre 34% de l'ensemble des Français)", détaille Ipsos.

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