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Gabon : les déchets de fer deviennent de l'or (REPORTAGE)

French.xinhuanet.com   2015-09-12 16:12:50      

LIBREVILLE, 12 septembre (Xinhua) -- Longtemps considérés comme de simples ordures qui pourrissaient derrière les maisons ou remplissaient les poubelles, les déchets de fer sont désormais devenus de l'or au Gabon grâce à la naissance d'un petit réseau local de transformation.

Le tournant a été amorcé vers la fin des années 1990. Des petits jeunes ont commencé à sillonner les quartiers avec un vieux sac en bandoulière pour récolter de la ferraille. Appareils électroménager, carcasses de voitures, vieux morceaux de tôle et autres étaient collectés par ces petits "récupérateurs" aux allures de personnes ayant raté leur vie.

Toute la ferraille récupérée était préalablement stockée dans les environs de la décharge publique de Mindoubé, dans le 5e arrondissement de Libreville. Selon des témoignages de spécialistes, le métier de récupérateur de ferraille serait d'ailleurs né sur cette décharge, qui reçoit quotidiennement tous les rebuts de la capitale.

Unique décharge publique de la capitale, Mindoubé accueille tous les déchets de Libreville, sans tri préalable. En 2013, la Société de valorisation des ordures ménagères du Gabon (SOVOG) estimait la quantité de déchets déversés à Mindoubé entre 250 et 300 tonnes par jour.

Les premiers récupérateurs, généralement des immigrés venus d'Afrique de l'Ouest et de quelques pays voisins comme le Cameroun, ont découvert cette décharge qui fût pour eux comme un "gisement d'or" à ciel ouvert.

"Ils rassemblaient la ferraille sur d'immenses dépôts sous le regard dédaigneux des riverains", se souvient Alain Moukouata, jeune étudiant qui a grandi dans les alentours de la décharge.

"Les carcasses de voitures, les vieilles machines à laver, les morceaux de tôle ou les vielles marmites étaient découpés, aplatis puis chargés dans des conteneurs avant d'être transportés au port pour un voyage vers l'Asie", ajoute M. Moukouata.

Dans les ménages, ces récupérateurs venaient soulager les familles des objets encombrant.

"C'était un moyen de retourner vers l'Asie les produits en fin de cycle dans notre pays", s'amuse à croire Emmanuel Ndong, enseignant de langue française dans un lycée.

Ce pédagogue estime que le Gabon, qui reçoit des pays européens et américains les machines à laver de seconde main et autres ustensiles de cuisine qui viennent terminer leur cycle de vie dans le pays, avait enfin trouvé une opportunité de réexporter cette misère, qui est de surcroît dangereuse pour l'environnement.

Au contraire, "c'était la belle époque", se souvient Adrien, un des plus anciens collecteurs de fer. Cet originaire du Cameroun affirme qu'il revendait le kilogramme de ferraille à 80 francs CFA chez l'un des deux principaux grossistes du secteur. Ses recettes hebdomadaires variaient entre 80.000 et 150.000 francs CFA.

"Le grossiste revendait aux Indiens au prix de 125 francs CFA le kilogramme", ajoute-t-il.

CRÉATION D'USINES ET DE MAINS-D'ŒUVRE

En 2008, le gouvernement gabonais réuni en conseil des ministres a pris une décision assez surprenante pour le commun des mortels.

L'exportation de fer de récupération et d'autres dérivés de fer est interdite sinon soumise à une autorisation préalable. Le pays ne disposait d'aucune industrie dans le secteur pour recycler la ferraille qui polluait l'environnement derrière les maisons ou sur l'unique décharge publique de la capitale.

Il a fallu attendre 2014 pour voir la première usine nationale de recyclage des rebuts ferreux. La Chaudronnerie du Gabon (CDG) a vu le jour dans la Zone économique spéciale de Nkok, à une trentaine de kilomètres de Libreville. Sa production actuelle est de 5.000 tonnes de fer à béton par mois.

Dans le même périmètre est déjà sortie de terre une autre usine de transformation de fer. Les Aciéries du Gabon (ADG) ambitionnent produire jusqu'à 60.000 tonnes de fer à béton par an.

Ces deux usines accentuent la chasse aux déchets de fer dans les villes et villages du Gabon. Des gros porteurs sillonnent les anciens chantiers forestiers pour démonter les vieux engins à chenilles et bulldozers abandonnés par les forestiers.

Tous les jours, des camions lourdement chargés pénètrent la Zone économique spéciale de Nkok pour livrer leur marchandise, qui est ensuite stockée à ciel ouvert avant de subir la transformation.

"Le Gabon était un pays fournisseur de matières premières, et il mettra maintenant sur le marché des produits semi-finis", a déclaré avec fierté le porte-parole de la présidence, Alain Claude Bilié By Nzé, dans une conférence de presse après une visite de la future usine des ADG.

La production locale est destinée naturellement au marché local, qui dépendait exclusivement des importations il y a une année seulement.

"Le surplus sera bien entendu exporté vers les pays de la sous-région dont la consommation de fers à béton a considérablement augmenté à cause de nombreux chantiers de développement", explique pour sa part Drissa Sabri, directeur technique des ADG.

Les deux usines ont créé 400 emplois directs et plusieurs autres indirects, notamment dans le secteur de la collecte. Au Gabon, le chômage frappe 20 à 30% de la population active.

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Gabon : les déchets de fer deviennent de l'or (REPORTAGE)

Publié le 2015-09-12 à 16:12 | french.xinhuanet.com

LIBREVILLE, 12 septembre (Xinhua) -- Longtemps considérés comme de simples ordures qui pourrissaient derrière les maisons ou remplissaient les poubelles, les déchets de fer sont désormais devenus de l'or au Gabon grâce à la naissance d'un petit réseau local de transformation.

Le tournant a été amorcé vers la fin des années 1990. Des petits jeunes ont commencé à sillonner les quartiers avec un vieux sac en bandoulière pour récolter de la ferraille. Appareils électroménager, carcasses de voitures, vieux morceaux de tôle et autres étaient collectés par ces petits "récupérateurs" aux allures de personnes ayant raté leur vie.

Toute la ferraille récupérée était préalablement stockée dans les environs de la décharge publique de Mindoubé, dans le 5e arrondissement de Libreville. Selon des témoignages de spécialistes, le métier de récupérateur de ferraille serait d'ailleurs né sur cette décharge, qui reçoit quotidiennement tous les rebuts de la capitale.

Unique décharge publique de la capitale, Mindoubé accueille tous les déchets de Libreville, sans tri préalable. En 2013, la Société de valorisation des ordures ménagères du Gabon (SOVOG) estimait la quantité de déchets déversés à Mindoubé entre 250 et 300 tonnes par jour.

Les premiers récupérateurs, généralement des immigrés venus d'Afrique de l'Ouest et de quelques pays voisins comme le Cameroun, ont découvert cette décharge qui fût pour eux comme un "gisement d'or" à ciel ouvert.

"Ils rassemblaient la ferraille sur d'immenses dépôts sous le regard dédaigneux des riverains", se souvient Alain Moukouata, jeune étudiant qui a grandi dans les alentours de la décharge.

"Les carcasses de voitures, les vieilles machines à laver, les morceaux de tôle ou les vielles marmites étaient découpés, aplatis puis chargés dans des conteneurs avant d'être transportés au port pour un voyage vers l'Asie", ajoute M. Moukouata.

Dans les ménages, ces récupérateurs venaient soulager les familles des objets encombrant.

"C'était un moyen de retourner vers l'Asie les produits en fin de cycle dans notre pays", s'amuse à croire Emmanuel Ndong, enseignant de langue française dans un lycée.

Ce pédagogue estime que le Gabon, qui reçoit des pays européens et américains les machines à laver de seconde main et autres ustensiles de cuisine qui viennent terminer leur cycle de vie dans le pays, avait enfin trouvé une opportunité de réexporter cette misère, qui est de surcroît dangereuse pour l'environnement.

Au contraire, "c'était la belle époque", se souvient Adrien, un des plus anciens collecteurs de fer. Cet originaire du Cameroun affirme qu'il revendait le kilogramme de ferraille à 80 francs CFA chez l'un des deux principaux grossistes du secteur. Ses recettes hebdomadaires variaient entre 80.000 et 150.000 francs CFA.

"Le grossiste revendait aux Indiens au prix de 125 francs CFA le kilogramme", ajoute-t-il.

CRÉATION D'USINES ET DE MAINS-D'ŒUVRE

En 2008, le gouvernement gabonais réuni en conseil des ministres a pris une décision assez surprenante pour le commun des mortels.

L'exportation de fer de récupération et d'autres dérivés de fer est interdite sinon soumise à une autorisation préalable. Le pays ne disposait d'aucune industrie dans le secteur pour recycler la ferraille qui polluait l'environnement derrière les maisons ou sur l'unique décharge publique de la capitale.

Il a fallu attendre 2014 pour voir la première usine nationale de recyclage des rebuts ferreux. La Chaudronnerie du Gabon (CDG) a vu le jour dans la Zone économique spéciale de Nkok, à une trentaine de kilomètres de Libreville. Sa production actuelle est de 5.000 tonnes de fer à béton par mois.

Dans le même périmètre est déjà sortie de terre une autre usine de transformation de fer. Les Aciéries du Gabon (ADG) ambitionnent produire jusqu'à 60.000 tonnes de fer à béton par an.

Ces deux usines accentuent la chasse aux déchets de fer dans les villes et villages du Gabon. Des gros porteurs sillonnent les anciens chantiers forestiers pour démonter les vieux engins à chenilles et bulldozers abandonnés par les forestiers.

Tous les jours, des camions lourdement chargés pénètrent la Zone économique spéciale de Nkok pour livrer leur marchandise, qui est ensuite stockée à ciel ouvert avant de subir la transformation.

"Le Gabon était un pays fournisseur de matières premières, et il mettra maintenant sur le marché des produits semi-finis", a déclaré avec fierté le porte-parole de la présidence, Alain Claude Bilié By Nzé, dans une conférence de presse après une visite de la future usine des ADG.

La production locale est destinée naturellement au marché local, qui dépendait exclusivement des importations il y a une année seulement.

"Le surplus sera bien entendu exporté vers les pays de la sous-région dont la consommation de fers à béton a considérablement augmenté à cause de nombreux chantiers de développement", explique pour sa part Drissa Sabri, directeur technique des ADG.

Les deux usines ont créé 400 emplois directs et plusieurs autres indirects, notamment dans le secteur de la collecte. Au Gabon, le chômage frappe 20 à 30% de la population active.

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