Des médias et des chercheurs internationaux jugent insincère la déclaration d'Abe (SYNTHESE)
Publié le 2015-08-15 à 15:55 | french.xinhuanet.com
BEIJING, 15 août (Xinhua) -- Le Premier ministre japonais Shinzo Abe n'a pas présenté vendredi ses propres excuses pour le passé militaire de son pays lors du 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce qui a suscité des critiques de nombreux médias et chercheurs à l'échelle internationale.
Pour les médias sud-coréens, la déclaration de M. Abe, qui n'a pas formulé d'excuses personnelles, manque de sincérité.
Comparée aux déclarations d'anciens dirigeants nippons tels que Tomiichi Murayama et Yohei Kono, celle de Shinzo Abe marque un grand recul en arrière, estime l'agence de presse Yonhap dans un commentaire.
Dans leurs déclarations respectives, MM. Murayama et Kono ont clairement mentionné la domination coloniale et l'agression japonaises qui ont causé des préjudices importants et de grandes souffrances à plusieurs pays asiatiques, note Yonhap. En revanche, M. Abe a employé des termes ambigus sur le plan personnel.
Le journal sud-coréen Chosun a ainsi relevé que la déclaration de M. Abe se contentait de citer les excuses de ses prédécesseurs et qu'il n'avait pas dit clairement que le Japon était responsable des crimes passés.
L'agence Associated Press a indiqué vendredi que le dirigeant japonais n'avait pas présenté ses propres excuses pour la Seconde Guerre mondiale. Pour Reuters, le Premier ministre japonais a personnellement exprimé sa "profonde peine" pour la guerre sans toutefois présenter lui-même d'excuses.
M. Abe a bien utilisé les mots "excuses" et "agression" dans sa déclaration. Or, à la différence de ses prédécesseurs Tomiichi Murayama et Junichiro Koizumi, il ne les a pas dits dans ses propres mots, estime Minoru Morita, un analyste politique tokyoïte. La déclaration de M. Abe manque de sincérité, a-t-il ajouté, cité par l'agence allemande DPA.
Dans un article paru sur le site d'analyses The Conversation, Sarah Hyde, maîtresse de conférences en politique du Japon à l'Université du Kent, estime que la façon dont le Japon se souvient de la Seconde Guerre mondiale rend toujours furieux ses voisins.
Malgré la rancœur générale contre cette guerre dans les autres pays d'Asie de l'Est, le gouvernement de M. Abe refuse d'améliorer l'éducation des Japonais sur ce conflit 70 ans après, note-t-elle.
"L'Allemagne a intégré l'Holocauste dans son histoire (...) en revanche, M. Abe et ses prédécesseurs n'ont jamais réalisé que les relations avec la Corée (du Sud) et la Chine pourraient grandement s'améliorer avec plus d'éducation et de débats au Japon sur ce passé terrible", estime Mme Hyde.
"Etant donné la situation actuelle, les relations entre le Japon et ses anciens adversaires devraient inévitablement se dégrader, peu importe la façon dont le très nationaliste et militariste Abe jongle avec la mémoire de la guerre à l'occasion de cette année anniversaire", prédit l'universitaire.
Gu Xuewu, directeur du Centre des études internationales à l'Université de Bonn, a indiqué à Xinhua que la déclaration de M. Abe n'était pas sincère sur le chapitre des excuses.
En avançant que le Japon a présenté des excuses plusieurs fois par le passé, Shinzo Abe, estime M. Gu, laisse entendre que le Japon "ne doit plus présenter d'excuses aujourd'hui et à l'avenir". Dans sa déclaration vendredi, le chef du gouvernement japonais indique en effet: "Nous ne devons pas laisser nos enfants, petits-enfants et les générations futures, qui n'ont rien à voir avec la guerre, être prédestinés à présenter des excuses".
M. Abe a voulu tout simplement "effacer l'histoire", selon cet expert.